121 rue de l’Ouest, prières de ne pas déranger !

Le local de la discorde (photo YB)

Deux semaines après la publication du rapport choc et alarmant sur l’entrisme des Frères musulmans, la Mairie du 14ème arrondissement, représentée par Madame la Maire Carine Petit et plusieurs de ses adjoints, a souhaité donner rendez-vous aux habitants et voisins de l’immeuble du 121 rue de l’Ouest pour discuter de la prochaine installation d’un musallâ (salle de prière) dans cet immeuble. Ce rendez-vous un peu agité a eu lieu hier mercredi 4 juin 2025 à l’école élémentaire Simone Veil située au 188 de la rue d’Alésia. En voici un bref et partiel (mais très impartial) compte rendu de la seule première heure.

Une salle de prière située au bas d’un immeuble social de la RIVP et à proximité d’un collège

Etaient également présentes pour répondre aux questions des 150 participants à la réunion Mme Najat Benali, rectrice de la mosquée Javel dans le 15ème arrondissement, présidente de la coordination des mosquées parisiennes, et future directrice de la mosquée du 121 rue de l’Ouest, ainsi que Mme Christine Lacombe qui représentait la Régie Immobilière de la Ville de Paris (RIVP). Un certain nombre d’habitants et de voisins de l’immeuble s’interrogeait en effet sur les conséquences très concrètes de l’installation d’une salle de prière proche de chez eux et se sont notamment enquis du caractère licite pour la RIVP, normalement tenue d’une obligation de neutralité confessionnelle, de louer un local à une association cultuelle. Mme Lacombe a répondu que la RIVP avait décidé d’accompagner ce projet d’installation car elle n’avait pas l’interdiction formelle de le faire (la neutralité confessionnelle invoquée n’étant qu’une recommandation) et compte tenu de la grande rareté du foncier dans notre arrondissement qui prive aujourd’hui nos amis musulmans de tout lieu de culte depuis la démolition du foyer Adoma du 12 passage de Gergovie dont la salle polyvalente du rez-de-chaussée servait de façon informelle de salle de prière. Elle a précisé que, dans d’autres zones immobilières tendues, une dizaine de pieds d’immeuble de la RIVP (sur les 2300 surfaces potentielles) avait déjà été consacrée à des lieux de culte et ajouté que le local du 121 rue de l’Ouest serait insonorisé pour éviter toute nuisance sonore pour les habitants de l’immeuble. Mme Najat Benali, rectrice de la mosquée du 15ème arrondissement, a confirmé que notre arrondissement manquait cruellement d’une salle de prière pour les musulmans qui sont dès lors contraints d’affluer dans la mosquée Javel qu’elle dirige pour pratiquer leur culte. Elle a très vigoureusement dénié que la future installation du 121 rue de l’Ouest puisse être de nature à attenter de quelque manière que ce soit à la tranquilité des habitants de l’immeuble ou des riverains et usagers du quartier environnant, notamment à celle des élèves du collège Giacometti voisin. “Les musulmans pratiquent leur culte à l’intérieur de leur lieu de culte très exclusivement, rappelle-t-elle. Et je ne suis aucunement responsable du prosélytisme de certains à l’extérieur des mosquées que je dirige – quelle que soit d’ailleurs leur religion.” Elle a certifié qu’il n’y avait pas de prières de rue à Paris et a énoncé cette évidence que les musulmans pratiquants ont également d’excellents rapports avec les autorités de police en précisant devant l’auditoire “qu’il fallait bien différencier les choses et que les musulmans ne sont pas des délinquants…”.

Liberté, égalité, fraternité, et… laïcité

Mme la Maire Carine Petit a quant à elle balayé les accusations d’opacité dans la prise de décision et d’absence d’information et de concertation de la population. “En responsabilité, j’assume complètement cette décision que j’ai prise en concertation avec le Préfet de Police et les associations parties prenantes”, a-t-elle clamé. “La concertation a eu lieu au moment de l’enquête publique qui souligne que la population locale a pleinement conscience de l’importance qu’un lieu soit organisé pour permettre aux musulmans de pratiquer leur culte. Et jamais je n’ai été évasive ni pratiqué le mensonge sur le fait que nous cherchions très activement une solution à ce problème et que cette solution consisterait très certainement dans le choix du local d’un bailleur social situé dans le quartier.” Dont acte. Mme la Maire, de concert avec Mme Benali, rappelle également que le principe républicain de laïcité impose que chaque religion puisse avoir sa place et disposer d’un lieu de culte même si le même principe exclut bien sûr le versement d’une quelconque subvention au bénéfice de l’association chargée de la gestion du lieu. Le mot de la fin (de la première heure de réunion…) est revenu au Père Antoine Guggenheim, délégué de l’archevêque de Paris pour les relations avec l’islam et les musulmans, qui a tenu à venir témoigner que la mosquée du 15ème arrondissement dirigée par Najat Benali “créait le calme et la paix“. “On assiste avec ces mosquées à la naissance d’un islam aussi européen que ne l’est l’église catholique, la croyance protestante ou le judaïsme, a-t-il affirmé. Les hautes autorités de l’Etat comme les autorités municipales ont un devoir qui est inscrit dans notre devise républicaine : liberté, égalité, fraternité. La liberté implique la liberté de culte. L’égalité implique que l’on puisse trouver des lieux de culte musulmans à côté des très nombreux lieux de culte catholiques déjà existants. Quant à la fraternité, elle s’écrit dans les deux sens : le devoir de fraternité de ceux qui ont été accueillis récemment et le devoir de fraternité de ceux qui les accueillent.” Nous nous sommes éclipsés sur ces paroles de paix en espérant qu’elles fassent effet sur l’assistance pour la suite du débat…

Le 14ème, est-ce (déjà) la RDA ?

Affichage municipal place Moro-Giafferi

Nous avons profité de ce premier dimanche de beau temps pour faire “le tour du propriétaire” de notre cher Quartier Pernety. Plutôt que regagner nos pénates par la rue Raymond Losserand après un frugal déjeuner au restaurant Les Tontons situé au n° 38 de la rue, nous avons emprunté le coude formé par la rue du Château, la place Moro-Giafferi et la rue Didot jusqu’à la place Flora Tristan qui jouxte la rue où nous avons notre domicile. Voilà ce que nous avons vu et photographié pour illustrer un articulet très polémique qui fait honneur à notre statut de blogueur indépendant.

Vers la zadisation ou la RDA-isation de Pernety ?

Faut-il donc être un indécrottable bobo et détester les impécunieux pour oser ne pas approuver le projet municipal de Sécurité Sociale Alimentaire (SSA) dont il est actuellement fait la promotion place Moro-Giafferi ? Bien sûr qu’il faut prévoir des dispositifs d’aide aux plus démunis dont un certain nombre habitent les très nombreux logements sociaux alentours ! Nous avons trop connu la pauvreté et trop longtemps été bénéficiaires du RSA pour ne pas en être conscients… Il y a encore quelques années nous fréquentions d’ailleurs assidûment le restaurant solidaire Les Artistes situé près de la galerie d’art municipale du 55 rue du Montparnasse – bien plus pour continuer à nous alimenter de façon saine et équilibrée que pour entretenir notre légende d’écrivain maudit ! Pourquoi alors ce soudain coup de blues devant les devantures un peu fouillis et anti-glamour des différentes adresses solidaires et écolo-bio des rues du Château et Didot ? Sans doute un effet d’accumulation : rejoué, le jouet solidaire ; Entre Pots ; Paris Ateliers ; Les Secondes Mains-LSM ; Association Les Enfants du Canal ; etc. Tout cela est sans doute très bien mais… Mais ça fait autant rêver qu’un vide grenier organisé un jour de pluie en hiver place de la Garenne ! Nous pressons donc un peu le pas pour regagner notre chaleureux chez-nous et tenter de retrouver un peu de moral en nous plongeant dans la lecture de Voici et de Gala, quand nous tombons rue de l’Eure sur un conteneur destiné au dépôt de vêtements usagés dont certains débordent sur la rue… On ne peut décidément plus échapper à la tyrannie du solidaire !

Le 14ème après Elias

Pernety 14 s’associe à tous les Quatorziens qui ont présenté leurs plus sincères condoléances à la famille d’Elias, le jeune adolescent tué samedi 25 janvier près de la porte de Châtillon dans le 14ème arrondissement de Paris. Si le deuil sera sans doute sans fin pour la famille, le temps du diagnostic et de l’action est déjà revenu pour toutes celles et tous ceux qui se soucient de “vivre ensemble” dans notre arrondissement. Sylvie Boudoulec, porte-parole du collectif COQUA, est depuis des années en pointe pour dénoncer la dégradation des conditions de sécurité des habitants du Quartier Pernety-Plaisance qui nourrit le sentiment d’abandon et de déclassement des populations, notamment celles qui résident dans les cités HLM. Elle a bien voulu répondre à nos questions.

Le meurtre d’Elias, tué par deux adolescents qui voulaient lui extorquer son portable, a bouleversé la France, les Parisiens et les Quatorziens. Y aura-t-il, selon vous, un “avant Elias” et un “après Elias” dans le 14ème arrondissement de Paris ?

Je dirais plutôt que ce meurtre marque pour les Quatorziens le paroxysme d’une violence et d’un état d’insécurité dont nous avons pu constater la préoccupante évolution ces dernières années. S’agissant du seul Quartier Pernety, plusieurs tragiques événements se sont succédés ces derniers mois qui en attestent : la rixe avec machette de mai dernier au Moulin de la Vierge ; le poignardage au mois d’août d’un jeune homme qui a fort heureusement survécu à ses blessures ;  l’agression quelques jours plus tard au Moulin de la Vierge d’une vieille dame de 83 ans très violemment projetée par terre et délestée de ses bijoux ; l’agression au mois de septembre dans le hall de son immeuble du 81 rue Vercingétorix d’une habitante qui, par chance, a pu se défendre par elle-même. On n’en a pas parlé car il n’y a pas eu de morts. Elias n’a pour sa part malheureusement pas survécu à l’agression de ses assaillants qui ont opéré dans un endroit où sévissait une forme de racket et d’intrusion depuis plus d’un an, comme l’a reconnu Madame la Maire. Il a fallu attendre ce drame effroyable pour que les Quatorziens qui se préoccupent de leur sécurité puissent enfin se faire entendre. C’est en ce sens qu’il y aura en effet un “après Elias”. Mais nous nous berçons peut-être d’illusions puisque notre Maire a déclaré à la presse que tout avait été fait pour assurer la sécurité dans le 14ème arrondissement. Nous continuons néanmoins à croire que ce meurtre constituera l’électrochoc qui va créer une rupture dans les discours de la municipalité et dans les analyses empreintes d’angélisme et déconnectées de la réalité qui les sous-tendent.

Si COQUA a été pionnier dans le signalement des problèmes d’insécurité dans le Quartier Pernety-Plaisance, peut-on vraiment parler, comme le font beaucoup, d’un déni de réalité de la Mairie de Paris et de la Mairie du 14ème s’agissant de l’insécurité ?

Oui, très certainement. Depuis 2016, l’année de la création de COQUA, on nous serine cette idée que nous serions victimes d’un “sentiment d’insécurité”. Les événements récents, auxquels je voudrais adjoindre le saccage de l’église Notre-Dame-du-Travail survenu en juillet dernier et qui reflète une autre forme de mal-être, nous donnent malheureusement raison. Je dis malheureusement, car l’objectif poursuivi par COQUA a toujours été de travailler au “vivre ensemble” en restaurant au quotidien les conditions de sécurité et de tranquillité des habitants du Quartier Pernety-Plaisance. De ce point de vue, même si notre diagnostic de départ s’est avéré exact, nous ne pouvons que constater notre échec. On ne peut même plus aujourd’hui parler de “vivre ensemble”, mais tout au plus de “mieux vivre ensemble”, voire même de “moins mal vivre ensemble”. COQUA a dans un premier temps pu être entendu par la Mairie centrale grâce au conseiller à la sécurité d’Anne Hidalgo avec lequel le collectif a travaillé sur le thème de la zone grise existant entre police municipale et police nationale. Mais ce bon contact a malheureusement été rompu après les élections municipales de 2020 à l’issue desquelles ont émergé dans notre arrondissement de nouveaux élus municipaux formant une équipe très resserrée autour de Madame la Maire Carine Petit et qui sont d’anciens militants associatifs qui n’ont aucune idée de ce que peuvent représenter les contraintes liées à l’administration d’une commune de 130.000 habitants. A partir de ce moment là, rien n’a pu venir contrarier un discours officiel lénifiant selon lequel l’équipe en place effectuait un travail formidable n’offrant aucune prise à la critique, fût-elle rationnelle et constructive… Nous déplorons également n’avoir plus aucune visibilité sur le contrat de prévention et de sécurité de l’arrondissement et d’avoir moins de contacts constructifs avec le commissariat de police dont le premier responsable ne reste que trois ans en poste, ce qui n’est sans doute pas suffisamment de temps pour apprendre à bien travailler avec les différentes parties prenantes dont la population du 14ème. Avec sa réélection comme principal objectif, la municipalité en place s’obstine à dire que tout va bien alors que la police nationale souffre toujours d’un manque de moyens (en équipage et en véhicules) sur le territoire de l’arrondissement et que la police municipale, toujours en nombre insuffisant, mal formée et non équipée, se retrouve bien souvent aux abonnés absents.

Un conseil d’arrondissement du 28 janvier 2025 un peu mouvementé

Quelles sont les pistes concrètes d’action envisagées par COQUA pour assurer une meilleure sécurité des Pernetiens et des Quatorziens et continuer à lutter contre la dégradation de leur qualité de vie ?

C’est une question très délicate car COQUA ne dispose d’aucun pouvoir de décision et n’a aucun réel levier pour vraiment améliorer la situation. Comme nous arrivons difficilement à nous faire entendre “en interne” au niveau municipal, nous tentons d’alerter “en externe” grâce à la presse ou en contactant directement la préfecture de police ou le commissariat pour que soient à nouveau réunis les groupements de proximité opérationnels (GPO) qui constituaient de très bonnes initiatives qui n’ont malheureusement eu aucune suite. Nous souhaiterions également que le conseil de quartier Pernety se saisisse, avec la même ténacité que nous, des véritables priorités des habitants du Quartier plutôt que se concentrer sur l’organisation d’évènements “festifs” qui sont souvent des flops retentissants, comme par exemple le coûteux festival Art of Game dont le bilan chiffré en termes de fréquentation a été très faible et dont on ne sait toujours pas combien de jeunes du Quartier il a pu mobiliser. L’on a quand même pu constater au conseil de quartier Pernety un léger progrès ces derniers temps : alors que l’obstruction municipale avait empêché la bonne tenue de la réunion plénière d’octobre 2022 sur le sujet de la sécurité, le nouveau conseil de quartier a mis à l’ordre du jour de la prochaine séance publique programmée en mars les thèmes que notre collectif porte depuis des années. Nous allons également à COQUA essayer de redéployer nos efforts en direction des associations de locataires de HLM que nous soutenons depuis longtemps. Leurs adhérents souffrent énormément et se replient donc sur eux-mêmes dans leur appartement en ne parvenant plus à s’intéresser à ce qu’il se passe à l’extérieur ou à ce qui relève de l’intérêt général des habitants. Leur faire retrouver un peu de moral est notre nouvel objectif pour 2025 !

Pour contacter et/ou rejoindre COQUA, vous pouvez envoyer un email à 75coqua14@gmail.com. Vous pouvez aussi vous connecter au compte X (ex-Twitter) du collectif : @Coqua14.

Des roses blanches en hommage à Elias (Collège Montaigne, Paris VIème).