Nous avons résolu l’énigme Miss Marple & Consorts

Catherine Desbordes à l’inauguration de Miss Marple & Consorts en 2017

Il n’y a vraiment pas de quoi être fier car il nous a suffi d’envoyer un courriel au siège de la brocante associative pour pouvoir convenir d’un rendez-vous avec Catherine Desbordes qui est la principale animatrice de la structure sise au 45 rue de la Sablière, tout près de la place Flora-Tristan. L’entrevue fut des plus agréables car Catherine fait partie de ces gens passionnés qui dégagent une énergie vitale qui vous pousse vers le haut. La passion comme moteur et comme carburant. Elémentaire, mon cher Watson !

Une vie au service de la musique classique

L’étincelle qui met le feu aux poudres de la passion musicale de Catherine Desbordes a lieu à Saint-Céré dans le Lot alors qu’elle a 14 ans. Elle et ses frères ainés tombent dans la marmite de la musique classique en assistant à un rassemblement choral qui les bouleverse complètement. Après avoir entendu le requiem de Brahms, ils se précipitent vers le président de l’association organisatrice et lui proposent de mettre toute l’énergie de leur jeunesse à son service. Catherine et ses deux frères commencent par s’occuper de la régie et de la logistique immobilière pour apprendre leur métier. En 1980, ils reprennent eux-mêmes les rênes du Centre Européen d’Echanges Musicaux avec l’idée de le transformer en une structure leur permettant de gagner leur vie tout en développant l’activité opéra. Ils travaillent cinq années, sept jours sur sept, avant de percevoir leur premier salaire. Alors que son frère Olivier qui est un artiste-né se consacre bientôt à la mise en scène d’opéras, Catherine s’occupe quant à elle de la production des spectacles musicaux en gérant toute la chaîne de leur fabrication. En 1993, elle opte pour une vie plus stable en travaillant au développement de l’ensemble baroque de Limoges sous l’impulsion de son chef Christophe Coin, avant de prendre en charge celui de la Fédération des Ensembles Vocaux et Instrumentaux Spécialisés (FEVIS) dirigée par Jacques Toubon. “Nous avons, avec Jacques Toubon, fait pendant dix ans un énorme et très efficace travail de lobbying pour que la sphère indépendante soit observée et considérée de la même manière que les orchestres permanents et les maisons d’opéras, témoigne Catherine. Alors que certains ensembles indépendants sont mieux ou très différemment lotis, historiquement et politiquement, nous nous sommes appliqués à les remettre à niveau et à rendre visible toute la sphère indépendante”. Catherine, qui a gardé intact l’enthousiasme de ses vingt ans, a des raisons d’être fière de son bilan. Combien de portes vers la musique classique et l’opéra les ensembles indépendants ont-ils en effet ouvert en ruralité ou dans les centres urbains de la banlieue parisienne, là où il ne se passe habituellement rien ou presque dans ce domaine particulier ? “Une levée de rideau avec 500 personnes qui vous disent merci les larmes aux yeux au mois de janvier au fin fond du Lot ou du Gers, ça vous donne des frissons et j’ai encore aujourd’hui les poils qui se dressent à l’évocation de ses souvenirs”, nous dit-elle.

Picture discs et affiches Rossignol

C’est pour rester en lien avec l’art vivant et pour faire profiter de son retour d’expérience de 45 ans de métier que Catherine et deux amis ont créé en 2017 l’association Miss Marple & Consorts qui accompagne et soutient les ensembles de musique indépendants dans la sphère classique. Le mentorat qu’exerce l’association a notamment été utile pendant le confinement de 2020 : “Quand vous avez plus de 40 ou 50 concerts annulés et que vous ne pouvez plus payer vos musiciens, vous êtes sujets à certains questionnements, notamment en termes de coûts et d’appréciations, pour lesquels nous pouvons par notre expérience apporter des éléments de réponse”, soutient Catherine. Nous restons dans tous les cas au service des indépendants et intermittents qui travaillent sur de beaux projets de musique classique.” La petite brocante du 45 rue de la Sablière atteste de cette présence et de ce soutien continus puisque tous les bénéfices des ventes financent (en partie) les missions de l’association. “Au moment de notre retraite, nous nous sommes demandés avec mes deux amis ce que nous pouvions faire pour ne pas mourir après de si passionnantes vies, et, puisque nous étions tous les trois très chineurs, nous avons décidé de monter cette petite brocante près de la place Flora-Tristan”, se souvient Catherine. C’est le bon plaisir de sa principale animatrice qui préside aux choix des objets proposés à la vente : “J’aime les choses anciennes et je me fais un plaisir personnel illimité”, assume-t-elle. On balaie un spectre qui va des années 1930 aux années 1960-70-80. Je m’amuse beaucoup à chiner et je me suis tout particulièrement prise de passion pour les picture discs qui datent pour certains du début des années 30 ainsi que pour les cartes scolaires réalisées dans les années 50-60 par les époux Rossignol pour faire évoluer par l’image l’apprentissage de la lecture et de l’écriture. Je les achète et je les donne à l’association.” Rien ne remplace bien sûr une visite à la brocante associative pour découvrir les autres trésors qu’elle recèle et qui font sa singularité : moulins à café et poivriers, produits publicitaires (buvards, thermomètres et chromos Liebig), terres cuites de l’Isle Adam, et bien sûr disques vinyles de musique classique. La brocante est aussi pour Catherine l’occasion d’assouvir son goût des autres et de créer du lien humain autour d’un café. Nous reconnaissons d’ailleurs “la parfaite détective à domicile” aux quelques questions qu’elle nous pose sur notre propre activité associative dans le 14ème… Autant tout cracher car rien ne saurait échapper à la sagacité de Miss Marple !

Cliquer ici pour accéder au site de Miss Marple & Consorts et ici pour sa page Facebook.

Dominique Massot : “On peut très vite se retrouver à la rue”

Dominique Massot en compagnie de Freddy Prudentos, Chef à La Mie de Pain (photo Colette Desage).

Il est membre du conseil d’administration et responsable des collectes alimentaires des Oeuvres de La Mie de Pain, l’association spécialisée dans l’aide d’urgence et la réinsertion sociale et professionnelle des personnes en difficultés. Le Quatorzien Dominique Massot nous a reçu dans son appartement de la rue Didot pour nous entretenir de son combat contre la précarité et l’exclusion au sein de sa structure caritative d’élection.

135 ans d’existence et des collectes alimentaires toujours en hausse

C’est au Lions Club que Dominique Massot s’est entiché de La Mie de Pain. L’ancien directeur commercial dont le leimotiv est la lutte contre la faim admet avoir craqué quand il a découvert la “population de misère” dont s’occupe l’organisation fondée il y a 135 ans dans le 13ème arrondissement de Paris par Paulin Enfert, un philanthrope catholique et personnage légendaire qui était également prestidigitateur à ses heures perdues. Le site internet de l’association (cliquer ici) retrace l’histoire de La Mie de Pain des origines du patronage Saint-Joseph de la Maison Blanche à nos jours. “De l’urgence à l’insertion”, tel est le slogan et également le programme de la structure caritative dont les activités sont centrées sur l’accueil (inconditionnel, anonyme et gratuit) et la mise à l’abri d’urgence des personnes les plus vulnérables, celles qui se trouvent exclues de la société. Ses missions et ses actions vont de l’aide alimentaire à l’insertion sociale et professionnelle en passant par l’hébergement d’urgence, le logement accompagné et en résidence sociale. Dominique s’occupe à titre bénévole tout particulièrement des collectes alimentaires depuis déjà une bonne douzaine d’années. Pour cet ancien spécialiste de la logistique qui a été pendant trente ans chargé d’organiser des transports terrestres, maritimes et aériens dans le monde entier, La Mie de Pain, c’est du gâteau ! Il n’en est pas moins très fier de son bilan : “Je me suis aperçu qu’au bout de dix ans j’avais collecté avec mon équipe l’équivalent de près de 350.000 repas, ce qui correspond à l’ensemble des repas que nous distribuons chaque année. Ca, c’est un chiffre qui me parle ! Et ce chiffre est en augmentation constante malgré les évènements de ces dernières années. Encore 35 tonnes en 2021, ce qui est un très bon résultat”, se félicite-il. L’essentiel de son travail consiste à trouver des bénévoles pour les collectes organisées dans la quinzaine de magasins dont il a la charge. “La bande à Massot” regroupe toutes celles et tous ceux qui recueillent les denrées dans les magasins ou bien les trient par catégories une fois acheminées par camion ou camionnette au siège de La Mie de Pain dans le 13ème arrondissement de Paris. Ce sont des copains dont il est allé tirer la sonnette et qui ont eux-mêmes dirigé vers lui d’autres personnes désireuses d’aider. “Tout se fait par le moyen du bouche à oreille et ça fait boule de neige car ceux qui sont venus une fois se prennent au jeu, témoigne Dominique. J’ai aujourd’hui 500 personnes qui sont inscrites sur la liste des volontaires de La Mie de Pain et que je peux contacter au moment d’organiser mes collectes. Cette liste regroupe toutes sortes de gens et des gens de plus en plus de jeunes, ce que je trouve personnellement très encourageant”.

Une structure diversifiée pour répondre à un éternel besoin de solidarité

La Mie de Pain s’est considérablement développée et a considérablement évolué depuis sa création il y a plus de cent ans, tout en restant fidèle aux préoccupations et aux valeurs de son fondateur Paulin Enfert : solidarité, non-discrimination, respect de la personne et engagement sur la durée. Sept structures situées dans différents arrondissements de Paris (principalement dans le 13ème, mais également dans le 15ème et le 5ème) répondent aujourd’hui aux besoins des personnes en situation d’exclusion : le Foyer de Jeunes Travailleurs, les Chantiers d’Insertion, l’Arche d’Avenirs, le Refuge, le Relais Social, le foyer pour femmes sans abri et la Villa de l’Aube. Toutes répondent à leur manière aux impératifs d’aide d’urgence et d’insertion des laissés pour compte de la société, et tout le monde quel que soit son âge est en réalité concerné. “Ca peut aller très vite la chute dans la rue, témoigne Dominique. Prenez l’exemple d’un couple avec enfants bien inséré. Quand le chef de famille perd son travail et donc ses revenus et que le loyer ne peut plus être payé, son couple éclate, il se fait virer de son logement et se retrouve quelques semaines plus tard sur le trottoir avec sa valise. Ca va très très vite, et nous accueillons régulièrement à La Mie de Pain des cadres qui ont tout perdu du jour au lendemain.” Le degré de civilisation d’une société se mesure à sa capacité à remettre sur pied ceux qui, à un moment donné de leur vie, pour de bonnes ou de mauvaises raisons, ont perdu l’équilibre. Et le personnel de La Mie de Pain travaille activement à faire évoluer le regard de la société sur les personnes exclues trop souvent victimes d’ostracisme. Celles qui sont actuellement aidées par l’association ont cinquante-trois ans de moyenne d’âge et peuvent être originaires de tous les pays (plus de quarante nationalités sont représentées). “Cela pourrait être vous ou moi, insiste Dominique. Les personnes migrantes venant de zones de conflits (les afghans, les syriens, les ukrainiens) sont-elles véritablement responsables de leur sort ? Notre accueil est de toute façon inconditionnel, c’est-à-dire sans distinction d’origine ou de confession, en plus d’être anonyme et gratuit. Nous remplissons en réalité le rôle de l’Etat qui nous subventionne quand même pour une bonne part”. Pour, vous aussi, aider La Mie de Pain à boucler son budget annuel de plusieurs millions d’euros, différents moyens sont à votre disposition : le don par courrier, le don en ligne, le soutien régulier par prélèvement automatique, le bénévolat (écrire à benevoles@miedepain.asso.fr) ou bien le legs. Les dons que vous adressez aux Oeuvres de la Mie de Pain sont déductibles à 75% de l’impôt sur le revenu en deçà d’un plafond qui évolue chaque année (à 66% au-delà de ce plafond).

Cliquer ici pour accéder au site de La Mie de Pain.

Le résultat d’une collecte à La Mie de Pain (photo Colette Desage).
Hall d’entrée du centre d’hébergement et d’insertion de la Mie de Pain (photo Colette Desage)

Les toutous de Pernety se rebiffent !

Camille et Rita, fondatrices du groupe des “toutous du quartier”

“Tout, tout, tout, vous saurez tout sur les toutous !” Il fallait nécessairement un complément au dernier reportage de Télé 14 intitulé Les toutous du quartier font de la résistance (cliquez ici) qui, depuis cet après-midi, fait la une de l’actualité dans le 14ème arrondissement de Paris. Nous avons rencontré à la terrasse du bar-restaurant L’Imprévu Camille qui a fondé avec Rita, sa petite Chihuahua, le groupe des Toutous du quartier destiné à créer du lien social entre les habitant(e)s du village Pernety propriétaires de chiens. Il s’agit concrètement de permettre à tous et à toutes de se retrouver autour de nos amis à quatre pattes et de partager des conseils et des bons plans pour rendre leur vie plus agréable. Rien de scandaleux a priori ! C’était sans compter sur le zèle de la police municipale du 14ème…

Le mauvais plan des squares interdits aux chiens

Nous promettons de ne pas lui prendre plus d’un quart d’heure de son temps car Camille est très occupée. Elle s’apprête à reprendre la boutique Chez Victor qui est située à l’angle de la rue Pernety et de la rue de l’Ouest et qui réouvrira, si tout se passe bien, avant la fin du mois. Cette native du 14ème arrondissement est très attachée au Quartier Pernety dont elle se désole de constater la dégradation actuelle des conditions de vie des habitants. C’est précisément pour contribuer au mieux-vivre ensemble qu’elle a créé il y a tout juste deux ans, au moment du second confinement, le groupe des Toutous du Quartier : “Lorsque j’ai eu Rita ma petite chienne et que j’ai commencé à la promener, j’ai rencontré d’autres propriétaires de chiot avec lesquels j’ai souhaité rester en contact pour permettre son éveil et sa nécessaire sociabilisation, se rappelle Camille. Mais le groupe que j’ai créé a aussi permis aux propriétaires de chien de ne pas rester isolés pendant le confinement. C’est d’ailleurs assez incroyable de voir le nombre de personnes que j’ai pu rencontrer de cette manière – surtout des femmes sans enfant, ce qui témoigne d’une nouvelle façon d’envisager la vie en dehors de la famille nucléaire classique. Nous sommes aujourd’hui au total 47 membres du groupe qui échangeons des renseignements sur la santé de nos petits protégés ou sur comment trouver un bon vétérinaire dans le Quartier !” Camille découvre à cette occasion à quel point les chiens sont vecteurs de lien social. Les propriétaires de toutous prennent l’habitude de se réunir au square Alberto Giacometti qui fait l’angle de la rue Didot et de la rue des Thermopyles ou bien dans le petit jardin public de la ZAC Didot qui jouxte la Place de la Garenne. Dans ces deux endroits interdits aux chiens, ils jouent au chat et à la souris avec les employés municipaux : “Nous avons fini par bien les connaître, témoigne Camille. Souvent ils se contentent de nous dire que nous n’avons pas le droit d’être là sans nous verbaliser. Ils nous tolèrent et nous les respectons en retour”.

Quatre membres de l’équipe des “Toutous du quartier”

Rupture d’égalité

Patatras ! Cette fragile complicité n’a plus été de mise samedi matin dernier dans le square Alberto Giacometti quand une poignée de policiers municipaux est venue verbaliser les gentils membres des Toutous du Quartier. Camille n’était pas présente sur les lieux mais fait entièrement confiance à Olivia qui a raconté la scène : “Les policiers nous ont dit qu’ils étaient chargés d’éradiquer les toutous des squares sur ordre de la Mairie et de Madame la Maire du 14ème, ce qui n’a pas manqué de me faire sortir de mes gonds”. La chargée de communication de l’association Vivre Plaisance ose en effet rétorquer aux policiers qu’ils seraient sans doute mieux inspirés de pourchasser les dealers et ceux qui occupent le square en y laissant chaque jour leurs détritus. “Je pense que les propriétaires de chien respectent plus les parcs et jardins publics que beaucoup de gens, abonde Camille. Et malheureusement, c’est nous qui sommes hors-la-loi ! C’est vraiment triste parce qu’il y a même des gens qui viennent avec leurs enfants pour leur permettre de jouer avec nos toutous. On peut bien sûr comprendre que les jardins publics soient interdits aux chiens dans la mesure où beaucoup de leurs maitres ne respectent pas en France les règles de propreté et d’hygiène indispensables. Mais on peut sans aucun doute travailler sur ces comportements comme j’ai pu le conster à Barcelone où aucune déjection canine ne pollue les rues et les parcs dans lesquels les chiens sont naturellement admis.” Le respect des lois et des autres est sans doute la clef du problème qui dépasse largement les critiques que l’on peut adresser à telle ou telle municipalité. Pour autant, les Toutous du Quartier ne comptent aucunement désarmer et travaillent activement à la préparation d’un voeu qui sera soumis au Conseil d’Arrondissement de Paris 14ème et qui vise à autoriser l’accès aux squares des chiens restés sous le contrôle direct de leur maître. “Un bon chien vaut mieux que deux kilos de rats”, aimait à rappeler Boris Vian…
Un toutou qui se tient droit !

Christian Deutsch, “médaille Fields citoyenne” du 14ème

La souriante équipe de CC14 au Forum des Associations 2022 (Christian Deutsch au fond à gauche)

Nous nous étions donné rendez-vous il y a presque un mois le 22 septembre 2022 à 11 heures au Café d’Orléans sur l’avenue du Général Leclerc et, à peine assis, j’ai commandé un Ricard. J’aurais été mieux inspiré d’opter pour un double café bien serré car Christian Deutsch est un redoutable intello. Il a été enseignant chercheur en mathématiques à la faculté, créateur d’une boite de conseil, haut cadre dirigeant d’une société multinationale en intelligence artificielle et fut en 2020 compagnon de route de Cédric Villani dans le cadre de sa campagne des élections municipales parisiennes. Il est aujourd’hui dans notre arrondissement le président fondateur de Citoyennes Citoyens de Paris 14ème (CC14) dont il nous a expliqué en 68 minutes et quelques flyers les tenants et les aboutissants.

Incub-acteurs de la démocratie particip’active

Citoyennes, Citoyens de Paris de 14ème est un incubateur d’initiatives citoyennes non partisanes. A l’origine de cette initiative, il y a le constat de l’actuelle défiance envers les corps intermédiaires (partis politiques, syndicats, entreprises, etc.) qui éloigne les citoyens du politique au sens noble du terme et met notre démocratie représentative en danger. D’où l’urgente nécessité de remettre les citoyens au coeur de la cité pour que les décisions prises au nom de l’intérêt général soient comprises, acceptées et suivies. CC14 se propose d’aider les habitants et usagers du 14ème à co-construire leur arrondissement en favorisant la participation citoyenne et en accompagnant le développement de leurs projets. L’association mobilise à ce titre ses adhérents et sympathisants, qui peuvent être “correspondants territoriaux” ou “incub’acteurs”, pour accompagner et aider les Conseils de Quartier dans les initiatives citoyennes qu’ils soutiennent. Rien de moins fumeux que tout cela : la preuve par les mégots ! Le 17 septembre 2022, CC14 s’est mobilisée pour participer à la Journée Mondiale du Nettoyage (World Cleanup Day) dans le cadre de la co-construction d’un projet “zéro mégot” avec la Mairie du 14ème qui trouve son origine dans l’initiative individuelle de Rayan, un citoyen engagé et amoureux de Paris qui s’est un jour mis à ramasser les mégots qui jonchent les trottoirs parisiens. Depuis, tous les samedis de 11 heures à 13 heures, les membres de CC14 au premier rang desquels se trouvent Marie-Pierre Bigot, Sébastien Goy et Rayan, mènent des actions pour la propreté de nos rues : 3.000 mégots sont ramassés en deux heures, ce qui aboutit à économiser 300.000 litres d’eau non polluée sachant qu’un seul mégot pollue cent litres d’eau, met douze ans à se désagréger et génère des microplastiques qui polluent pendant 150 ans (!). Par cet exemple très concret, Christian nous montre comment une problématique qui peut se poser à n’importe quel individu peut se transformer en projet citoyen. “Nous souhaitons avec CC14 redonner le goût à la politique dans un rapport non clientéliste d’interaction citoyenne, nous explique Christian qui est très alarmé par le taux d’abstention aux élections. Pour ce faire, nous nous sommes demandés ce qui pouvait ramener le citoyen dans l’élection et le jeu politique local en le rendant acteur de la vie démocratique de la cité. Car, poursuit-il, une fois sorti de la campagne électorale, le citoyen disparait pour ne plus apparaître que lorsque les élus le décident dans le cadre de participations publiques concernant par exemples le Plan Local d’Urbanisme (PLU) ou bien l’aménagement de certaines places (Denfert-Rochereau, de Catalogne, des Droits de l’Enfant, etc.). Or ces consultations sont souvent des faux-semblants en ce qu’elles sont loin de respecter les principes de la démocratie particip’active énoncés dans la Charte mise en place par le gouvernement en matière d’environnement et qui a été utilisée de façon exemplaire par le Conseil régional Centre-Val de Loire pour toutes les questions de participation publique. Cette charte n’est malheureusement absolument pas appliquée par la Mairie de Paris.”

Accompagner les Conseils de Quartier

Christian et les membres de CC14 sont convaincus que tous les citoyens ont un rôle actif à jouer dans la vie de la cité, y compris en dehors des campagnes électorales. Cette implication accompagnant la conscience citoyenne doit naturellement aboutir à faire monter l’exigence collective envers les élus. En quoi cependant l’action de CC14 se distingue-t-elle de celle des Conseils de Quartier qui sont des structures qui existent depuis 2002 et qui associent les habitants des grandes villes à la gestion municipale ? “CC14 accompagne les Comités d’Animation des Conseils de Quartier et veille à ce qu’ils fonctionnent mieux, nous répond Christian. Nos adhérents et sympathisants sont d’ailleurs bien présents dans chacun des Conseils de Quartier du 14ème arrondissement et contribuent à en améliorer le fonctionnement en les décloisonnant géographiquement et en oeuvrant à la coordination et à la mutualisation des ressources nécessaires pour en assurer l’animation. Nous avons un rôle assez semblable à celui de l’observatoire de la démocratie locale dont nous venons de faire voter, lors de notre dernière plénière, l’urgence de la mise en place.” Car Christian est tout particulièrement actif au sein du Conseil de Quartier Mouton-Duvernet sur le territoire duquel se trouve le site de La Rochefoucauld. Ce site qui constitue un enjeu municipal considérable a été l’occasion d’une véritable démonstration de force du travail de CC14 à toutes les étapes de l’élaboration du PLU. “Lors de la première phase du PLU, la Mairie a lancé une consultation demandant aux citoyens de s’exprimer sur le diagnostic, se rappelle Christian. A l’occasion de cette phase essentielle, CC14 a déposé 80 à 90% (!) des points de diagnostic, ce qui a d’ailleurs été le motif d’un grand satisfecit de la Mairie sur l’efficacité de la consultation. Nous avons par la suite participé, conjointement avec l’association Sauvons La Rochefoucauld, à la rédaction d’un voeu voté en plénière puis en Conseil d’Arrondissement par lequel nous réclamions aux élus une véritable concertation sur le projet de même que la mise en place d’un comité de suivi – qui n’est pourtant malheureusement toujours pas installé aujourd’hui…”. La relative efficacité du travail entrepris ne décourage nullement Christian. CC14 continuera à communiquer pour alerter les habitants et usagers du 14ème et les exhorter à tenir leur rôle de citoyens concernés par l’évolution de leur cadre de vie local. L’une des dernières initiatives de l’association a d’ailleurs été d’accompagner et de soutenir le Comité d’Animation du Conseil de Quartier Mouton-Duvernet dans la réalisation lors du dernier Forum des Associations d’un sondage intitulé “Vivre la citoyenneté sur votre quartier” et destiné à mesurer la motivation des Quatorziens à participer à leur Conseil de Quartier. Un paramètre ô combien important à prendre en compte lorsqu’on s’attelle à résoudre l’équation pas du tout impossible du mieux vivre ensemble dans le 14ème arrondissement de Paris !

Cliquez ici pour accéder au site de CC14.

Des jeunes également très motivés

La parcelle oubliée du royaume de Michèle Leroy

Michèle Leroy devant la statue de Soutine

“C’était un petit jardin / Qui sentait bon le Métropolitain / Qui sentait bon le bassin parisien”, chante Jacques Dutronc. S’il est un magnifique petit jardin, c’est bien le square Gaston-Baty sur lequel veille sans relâche Michèle Leroy, présidente de la SSGB (Association pour la Sauvegarde et la Protection du Square Gaston-Baty). Et l’on comprend très bien qu’elle tienne à ce square niché au coeur du Quartier Montparnasse-Raspail comme à la prunelle de ses yeux tant il est en tout point délicieux et charmant. Elle nous en a fait faire la visite circonstanciée ce jeudi 11 août 2022 un peu avant midi. A peine l’enchantement rompu, nous avons évoqué devant un verre au Café La Liberté l’ensemble des questions tournant autour de ce splendide îlot de verdure qui est aussi un puits de lumière et de culture.

Un joyau parisien dans un quartier voué au théâtre et à la culture

Est-il un triangle d’or (autre nom du triangle sacré) sensé développer des énergies, comme l’enseigne le savoir antique ? Evoque-t-il la fertilité universelle ou quelque autre principe féminin, comme le prétendent ceux qui possèdent un certain niveau de connaissances ésotériques ? Toujours est-il que le square Gaston-Baty est de forme triangulaire. Délimité par les rues Poinsot (à l’ouest), Jolivet et du Maine, il a été créé par décret du 2 décembre 1881 sur une surface d’un peu plus de 1000 m2 (1035 m2 très précisément). Il porte le nom de Gaston Baty (1885-1952) en l’honneur de celui qui dirigea entre 1930 et 1943 le théâtre Montparnasse tout proche. Ayant fait l’objet d’une rénovation complète en 2013, il est aujourd’hui planté de tilleuls et de houx taillés en cônes et est équipé d’une aire de jeux pour les enfants qui s’y sentent très en sécurité et dont les cris et les courses égayent les lieux. Sur le côté du triangle qui correspond à la rue du Maine trône une statue en pied, en bronze, du peintre Chaïm Soutine, par Arbit Blatas, datée de 1963 et signée sur le socle. Ont également ces dernières années été adjointes au square une fontaine (suite au vote d’un voeu émis par le conseil de quartier) et une très jolie boite à livres rouge qui ajoutent encore à la magie du lieu. Tout le monde, à vrai dire, aime le square Gaston-Baty. Les habitants du Quartier bien sûr qui y sont très attachés, mais également les personnels de service d’entretien et les jardiniers de la ville qui ont à coeur de le maintenir en très bon état. De toute façon, la SSGB, fondée en mai 2011 par Alain Chauvet, le surveille et le dorlote en permanence. Comme nous le rappelle Michèle, sa nouvelle présidente, l’association s’est donnée pour but “la sauvegarde, la protection et la mise en valeur du square Gaston Baty et de son environnement” (article 2 des statuts). Et Madame la Présidente bataille sans arrêt pour que ce qui est devenu son “pré-carré” puisse être en mesure de continuer à donner le meilleur de lui-même aux habitants du Quartier et à leurs enfants : elle signale le manque d’entretien de ses plantations ; elle se démène pour que le nombre de ses entrées soit réduit de six (!) à trois et que des bancs soient installés en lieu et place de certaines de ses quelque quarante chaises pour permettre le repos des SDF ; elle tente enfin d’organiser une fête annuelle des enfants qui a déjà été réalisée avec succès en 2019.

Michèle devant la nouvelle boîte à livres rouge

La pomme de discorde de la parcelle Gaîté/Jolivet

Mais son principal souci ne se situe pas dans le square Gaston-Baty lui-même, plutôt à sa périphérie est. Il concerne une petite parcelle de terrain actuellement laissée à l’état de friche : la parcelle Gaîté/Jolivet qui fait face au Café Gaîté et n’a pas fini de faire parler d’elle, comme le souligne l’édito du 34ème numéro daté de mars-avril 2022 de La Lettre du Square qui est la publication éditée par la SSGB à 1000 exemplaires environ pour assurer le lien entre l’association et les habitants du Quartier. Que va finalement devenir cette fameuse parcelle ? Elle est à l’origine un terrain privé que la municipalité avait acquis en 2017 par voie d’expropriation en se fondant sur une déclaration d’utilité publique motivée par la réalisation d’un immeuble d’habitation à vocation sociale de cinq étages et vingt-cinq logements assortis d’un local commercial. La SSGB, plébiscitée par les habitants consultés, a pour sa part pendant des années milité pour l’aménagement de cette aire en un espace vert qui se situerait dans le prolongement du square Gaston-Baty. L’idée a fait son chemin auprès des élus puisqu’en 2020, pendant la campagne des municipales, Madame la Maire Carine Petit l’a reprise à son compte. Patatras ! Lors du conseil d’arrondissement de novembre 2021, le projet d’espace vert est abandonné et la réalisation d’un immeuble remise au goût du jour. De format plus modeste que le plan initial, il deviendrait une pension de famille/maison-relais de 25 logements destinée à des personnes seules. La volte-face municipale rompant avec l’engagement pris auprès des électeurs trouverait sa justification dans la prise de conscience tardive de la Mairie que l’ex-propriétaire pourrait se retourner contre elle si elle ne respectait pas les clauses de la déclaration d’utilité publique. Un de ses adjoint s’est efforcé de faire oublier cette bévue en soulignant l’intérêt de l’existence de ce nouveau gîte pour les personnes isolées et précaires qui sont souvent des personnes en grandes difficultés sociales et en mauvaise santé. Par la voix de son représentant, le groupe écologiste s’est estimé piégé dans cette affaire, mais a tout de même approuvé la nouvelle orientation. L’opposition municipale représentée par M. Eric Azière n’a pas été convaincue par l’argumentation mise en avant pour justifier la dérobade municipale. A ses yeux, l’implantation d’une pension de famille à cet endroit serait un véritable sacrilège car elle contribuerait à changer la nature d’un quartier voué à la culture, au théâtre et à l’animation. Au final, une majorité hésitante mais disciplinée a donné son aval au projet et le Conseil de Paris a entériné la décision le mois suivant. La SSGB continue à bien sûr vivement contester ce choix. Elle rappelle que le projet de pension de famille va à l’encontre des engagements pris par tous les représentants des différents groupes du conseil municipal et que l’on ne peut pas prétendre défendre la vision d’une ville accueillante, verte et aérée et en même temps construire sur le moindre espace qui se libère. Alain Chauvet ajoute en guise de conclusion optimiste que l’immeuble en ruine qui a été démoli en 2018 à cet endroit aurait dû l’être dès 1913 (!) et que l’association dispose encore de quelques temps pour fourbir ses armes si la même sage lenteur prévaut toujours à l’Hôtel de Ville… “De grâce, de grâce / Monsieur le promoteur / De grâce, de grâce / Préservez cette grâce / De grâce, de grâce / Monsieur le promoteur / Ne coupez pas mes fleurs.”
Michèle Leroy et Alain Chauvet devant la parcelle de la discorde

Association pour la Sauvegarde et la Protection du Square Gaston-Baty (SSGB) – 10 rue Poinsot 75014 Paris – 01 43 22 60 98 – sauvegarde.square.gb@gmail.com.

“Le Moulin à Café” prend un coup de jeune pour ses 16 ans

L’équipe 2022 du “Moulin à Café”

Seize ans, c’est l’âge légal de l’émancipation dans la plupart des pays. Cela fait justement un peu plus de seize ans que Le Moulin à Café a ouvert ses portes pour la première fois sur la place de la Garenne dans le 14ème arrondissement de Paris. Les équipes qui se sont succédé aux commandes du café associatif ont toujours veillé à garder intactes les valeurs fondatrices des pionniers du lieu : reconnaissance et acceptation de la diversité sociale, respect mutuel et sentiment d’appartenance au même Quartier. D’aucuns avaient toutefois pu observer qu’il n’était pas très fréquenté par les jeunes vivants alentour. Un tournant semble avoir été pris cette année après le long tunnel de la fermeture consécutive à la pandémie de Covid-19. Nous avons rencontré Hélène, la nouvelle responsable de l’endroit, pour en savoir un peu plus.

Equipe renouvelée et bénévoles en or

Le Moulin à Café, qui est un des poumons associatifs du 14ème arrondissement, a enfin ôté son masque et respire à nouveau. Hélène y est arrivée en 2021 au poste de responsable-coordinatrice en remplacement de Thomas. Elle a travaillé pendant 25 ans en tant que journaliste puis rédactrice-en-chef au sein d’associations humanitaires avant d’entreprendre une reconversion professionnelle dans le domaine de l’économie sociale et solidaire. C’est en vue d’alimenter son mémoire de master consacré à l’accès à l’alimentation durable des personnes en situation de précarité qu’elle a postulé au Moulin à Café pour finir par intégrer l’équipe en place en avril 2021 juste en amont de l’Assemblée Générale de l’association qui a vu Catherine Tanguy et Frédéric Vuillod échanger leur poste respectif de présidente et de trésorier. D’autres petits changements ont affecté la composition de l’équipe à l’occasion de la crise sanitaire. Au niveau du conseil d’administration, Anne-Sophie et Camille, deux jeunes femmes nouvellement arrivées, contribuent avec Hélène à redynamiser la structure en apportant de nouvelles compétences et un nouveau regard sur son fonctionnement. Côté cuisine, ça bouge également puisque le très sympathique Antonio a rendu son tablier et que Guillermo, le chef-cuisinier, quittera lui aussi le navire fin août. Loubna, jusqu’à présent bénévole de l’association, a été recrutée en tant qu’aide au service et vient compléter l’équipe de six salariés qui constitue le staff du Moulin à Café. Le café associatif continue par ailleurs (grâce à l’aide du dévoué Ronald) à accueillir de nombreux jeunes bénévoles dont l’action sur la durée est néanmoins contrariée par un turn-over important. Françoise (co-responsable du recrutement des bénévoles), Patrick et Martine, qui sont trois piliers du café associatif, restent quant à eux toujours fidèles au poste et ont été fort justement récompensés en décembre 2021 par Madame la Maire Carine Petit pour leur dévouement désintéressé de très longue date (15 ans pour l’une d’entre eux !).

Remise de médailles d’or du bénévolat à Françoise et Patrick par Mme la Maire du 14ème

Des jeunes du Quartier beaucoup plus nombreux

L’équipe du Moulin à Café est donc bien calée sur les starting blocks pour relever les défis de l’après-Covid dont celui du rajeunissement de sa clientèle et du public de ses soirées et spectacles. “Le confinement a suscité un fort désir de revenir au Moulin à Café et de fréquenter ce type de lieu pour se rencontrer, constate Hélène. C’est notamment vrai des jeunes qui ont été particulièrement mis à mal par cette crise sanitaire en étant souvent enfermés dans des petits studios sans possibilité de contact avec l’extérieur. C’est vers eux que nous avons principalement axé notre communication en les invitant à venir s’installer dans notre café associatif sans aucunement les obliger à consommer.” Les jeunes du Quartier dont certains logent dans la résidence du CROUS située juste au-dessus du Moulin à Café ont de fait pris la nouvelle habitude de venir s’y restaurer ou boire un verre en assistant à des concerts (pour lesquels un espace scénique sera prochainement mieux identifié). Le restaurant reste néanmoins également très couru des plus séniors et affiche pour cette raison souvent complet à l’heure de midi. Il est vrai que toute l’équipe du pôle restauration a maintenu des efforts constants, y compris pendant le plus dur de la crise sanitaire, pour proposer chaque jour deux menus complets dont un végétarien et permettre à tous d’accéder à prix modique (quoiqu’en légère hausse de 50 centimes) à une alimentation saine, équilibrée, bio et faite maison. “En lien avec le chef-cuisinier actuel, nous avons souhaité cette année faire des efforts sur les desserts qui n’étaient jusque là pas la spécialité, ajoute Hélène. Mais nous sommes de façon générale toujours au maximum sur du circuit court et du bio. Nous avons d’ailleurs noué un nouveau partenariat avec les saisonniers sur les oeufs et continuons bien sûr assidument à privilégier pour nos achats de produits les producteurs et commerçants locaux ainsi que la Biocoop.”

Concert des “Plastic Pulses” le 3 juin 2022

Des soirées thématiques vectrices d’un nouveau regard 

Le pôle restauration qui reste central en ce qu’il constitue un facteur essentiel de lien social n’est pas le seul à connaître un renouveau post-Covid. Nous avons en effet également pu constater que les soirées organisées au Moulin à Café attiraient bien plus de monde qu’avant la crise sanitaire au point de remplir entièrement la salle du café associatif. “J’ai essayé d’impulser une programmation relativement éclectique, nous indique Hélène. Aux concerts qui fonctionnent très bien car les groupes amateurs qui s’y produisent sont de très bonne qualité sont venues s’ajouter des soirées thématiques variées qui reflètent mon goût prononcé pour le théâtre et la culture au sens large. Nous avons fait venir des troupes de théâtre et d’improvisation théâtrale que nous avions rencontrées au Forum des Associations et un grand nombre de conférences-débats se sont tenues sur des sujets extrêmement divers. Certaines organisées de façon récurrente ont permis d’identifier le lieu comme un lieu de lutte contre certaines discriminations dont celles touchant les femmes. Nous nous sommes notamment appuyés sur la série documentaire H24 dont nous avons proposé tous les mois quatre épisodes par séance pour organiser des débats autour d’intervenants extérieurs comme par exemple Ghada Hatem qui est spécialiste de la question des violences faites aux femmes et fondatrice de la Maison des femmes à Saint-Denis. Cela nous a permis de faire venir des gens qui n’avaient pas l’habitude de fréquenter notre endroit et également de faire évoluer les regards parce qu’il s’est trouvé des habitués qui n’avaient au départ aucune envie de participer à ces soirées et qui se sont finalement rendu compte qu’elles étaient moins des charges contre les hommes que l’occasion d’ouvrir un débat.” 

La terrasse du “Moulin à Café” où venir bronzer au soleil les après-midis d’été…

La continuité en réseau

Pas de panique pour les habitués du Moulin qui ne veulent pas trop être bousculés : les activités traditionnelles du lieu continueront à y être assurées pour tous les adhérents qui se seront acquittés du prix de leur carte d’adhésion annuelle qui est resté en 2022 de 18 euros (5 euros pour les moins de 26 ans et les minima sociaux). Improvisation théâtrale, danse jazz, gymnastique douce et jeux de société (scrabble, tarots, etc.) sont donc toujours à l’honneur dans leur café associatif préféré. Il en est de même de la scène ouverte animée par Ridha tous les vendredis du mois. Un groupe s’est également créé autour de la petite parcelle de jardin partagé située à proximité dans le jardin du Château Ouvrier, qui s’est vu chargé de s’occuper de fleurir les jardinières entourant le local. “Nous avons aussi reçu des propositions de nouvelles d’animation de la part de bénévoles du Quartier sur des activités régulières comme le chi gong, le yoga ou la relaxation sonore, nous précise Hélène qui a assuré le lien avec la Mairie prêteuse de la salle de la rue du Moulin des Lapins où peuvent s’exercer ces activités. Enfin, sous l’impulsion de son président Frédéric Vuillod, Le Moulin à Café s’inscrit désormais dans un réseau des cafés associatifs parisiens et de banlieue qui organise une fois par trimestre une conférence-débat sur la meilleure façon de créer, animer et faire perdurer un café associatif. Sous doute la meilleure façon de faire en sorte que ces lieux conviviaux puissent bénéficier d’une éternelle jeunesse sans trop compter les années !

Cliquez ici pour accéder au site (et connaître le menu du jour) du Moulin à Café.

Françoise et Patrick, respectivement 15 et 10 ans de bénévolat au four et au Moulin !

Patricia Benech Le Roux, “women empowerment activist”

Photo Nath Lee Vall’art

“Hom’Art pour tous !” Tel est le slogan de Garidell14, l’association fondée par Patricia Benech Le Roux, qui exprime bien ce que peut être la générosité bretonne en action. Garidell signifie galerie en breton. Patricia a choisi le 14ème arrondissement où les Bretons restent très implantés comme galerie principale des oeuvres de street art des artistes femmes qu’elle entend avant tout promouvoir. Nous l’avons rencontrée dans le Quartier Pernety où elle réside non sans avoir poussé une pointe jusqu’à la Régie de Quartier Paris 14 où elle exerce ses talents de coordinatrice de projet Lien social et cultures et même jusque dans le 13ème arrondissement à la Cité de Refuge de l’Armée du Salut où elle a également essaimé.

Faiseuse de liens à la Régie de Quartier Paris 14

C’est vraiment un très bel endroit que la Régie de Quartier Paris 14. Les portes et fenêtres peintes de toutes les couleurs de la rue Prévost Paradol sont un îlot de fraîcheur bienvenu dans le Quartier de la Porte de Vanves qui est un quartier prioritaire de la politique de la ville. C’est à cet endroit que Patricia Benech Le Roux a choisi de retourner “travailler sur le terrain” après avoir exercé pendant presque vingt ans des fonctions de chercheuse en sociologie au CNRS. La Bretonne de Trévou-Tréguignec va commencer par y être coordonnatrice de l’Accorderie Paris Sud pour conduire ce dispositif de solidarité vers l’autonomie associative et financière. L’Accorderie est l’expression d’un concept québécois qui organise des échanges de services rémunérés en temps pour lutter contre la pauvreté et l’isolement. Patricia en connait bien le fonctionnement puisqu’elle y a effectué dès 2015 un stage de quinze jours pour valider son Certificat de Formation à la Gestion Associative à la suite duquel elle est elle-même devenue accordeuse (*). “Ce qui m’a tout particulièrement plu dans ce dispositif c’est qu’il permet de développer le pouvoir d’agir des individus et des collectifs, se rappelle-t-elle. Je me retrouvais complètement politiquement et idéologiquement dans cette notion d’empowerment”. Patricia approfondit ensuite sa connaissance du travail associatif en devenant responsable de projet Lien social et cultures de la Régie de Quartier Paris 14. Comme celui de toutes les régies de quartier, l’objectif de la structure basée Porte de Vanves est double : insérer par l’activité économique et assurer le lien social avec les habitants du quartier alentour. C’est dans ce dernier registre que Patricia va tout particulièrement s’illustrer en animant le Collectif Paradol (cliquez ici) qui organise des fêtes de quartier dans le large espace piétonnier coloré de la rue Prevost Paradol. Ce groupe informel, qui se réunit une fois par mois pour un échange d’idées, rassemble actuellement une quinzaine d’associations ainsi que les bailleurs sociaux qui sont propriétaires de la quasi-totalité des murs du quartier. Les fêtes de quartier qu’il prépare sont au nombre de quatre par an : Faîtes de la soupe en mars, Paradol Plage en juillet, De l’Art à Paradol en octobre et Lumières sur Paradol en décembre. Patricia prend également part à l’animation du Café culturel Paradol (cliquez ici) en y organisant tous les mois des expositions d’artistes locaux et d’ailleurs. En plus d’instiller de la culture dans la vie du quartier dont elle a la charge de développer le lien social, la coordonnatrice de projets milite activement pour l’embauche de femmes au sein des quatre pôles de la régie dédiés à l’insertion professionnelle des habitants. “Il me tient très à coeur de favoriser le travail des femmes en insertion vu les conditions de vie très difficiles qui sont les leurs : hébergement dans des centres d’accueil, enfants en bas âge ou restés au pays, etc. Or le travail tel qu’il est pensé ne favorise bien sûr pas du tout leur insertion professionnelle. S’il ne tenait qu’à moi, nous embaucherions 100% de femmes à la Régie de Quartier Paris 14”.

Les portes et fenêtres colorées de la Régie de Quartier Paris 14

Fresques participatives 100% féminin

En parallèle de son activité salariée à la régie de quartier, Patricia développe au sein de Garidell14, l’association qu’elle a fondée en 2015, des activités bénévoles qui visent également à favoriser l’emporwerment des femmes. Au départ, Garidell14 se donnait pour objectifs généraux de favoriser l’accès à l’art et de promouvoir l’art urbain, qui est peut-être le plus accessible et le plus libre d’entre les arts, en vue de favoriser la mixité sociale et culturelle. “J’ai été complètement renversée par l’esthétique et l’invention de certains street artists, se souvient l’ex-chercheuse en sociologie. L’exposition de 2013 de Keith Haring au Centre Pompidou ainsi que celle intitulée “Le pressionisme” qui s’est tenue la même année à la Pinacothèque et qui raconte l’histoire du street art à New York (avec des artistes comme Lady Pink, Basquiat ou Rammellzee) ont été de véritables chocs et les déclics de ma passion pour l’art urbain. J’ai également été très impressionnée par les pochoirs de Kristx que j’ai pu admirer au milieu de graffs et de fresques de toutes sortes en me rendant à Ivry-sur-Seine. On peut vraiment être scotché par les oeuvres de certains artistes urbains en arpentant les rues d’une ville”. Sa sensibilité féministe affirmée va l’amener à tout particulièrement s’intéresser aux street artists femmes. Elle commence par mettre en place des expositions qui en promeuvent les oeuvres à la Maison des Associations du 14ème, puis dans différents autres lieux qui réunissent jusqu’à 25 artistes et plus. La première fresque participative 100% féminin qu’elle organise va redonner vie à un mur du Collège François Villon à la Porte de Vanves en 2017. Mais le plus beau projet qu’elle a réalisé à ce jour est sans doute celui de la Cité de Refuge qui dépend de l’Armée du Salut et qui est abritée par un immeuble conçu par Lecorbusier situé dans le 13ème arrondissement de Paris. Christophe Piedra, le directeur du centre d’hébergement, se félicite que Patricia soit venue mettre de la vie dans ce lieu ouvert aux arts et à la culture : “L’idée de départ était de faire une exposition éphémère, se souvient-il. Mais sentant le fort potentiel de ce que Patricia pouvait nous apporter, je lui ai proposé de s’occuper également des murs de la Cité avec le concours des personnes accueillies qui se chargeraient de choisir les oeuvres des street-artists femmes et même de participer à leur création. Le fait d’avoir orné les murs de graffs de qualité a complètement changé l’atmosphère de la Cité des Dames qui est le dispositif que nous avons créé pour accueillir les femmes en précarité”. C’est à nouveau le mur du collège François Villon dans le 14ème arrondissement qui aura les honneurs du prochain projet porté par Patricia en accueillant une nouvelle fresque participative 100% féminin qui sera réalisée en juin 2022 à partir des choix effectués par un jury d’habitants composé d’élèves de Villon, de locataires RIVP et de jeunes du Centre Socioculturel Maurice Noguès qui se verront proposer sur Instagram différentes oeuvres réalisées par des artistes femmes. Sans nul doute une nouvelle façon de surprendre et d’interpeler les habitants et passants de la Porte de Vanves en produisant d’éphémères mais authentiques oeuvres d’art. “Celui qui ne voit rien d’étrange n’a jamais regardé un homard en face” (Auguste, comte de Villiers de l’Isle-Adam).

Graff “en construction” de Kaldea à la Cité de Refuge (2019)

(*) Patricia est aujourd’hui membre du conseil d’administration et vice-présidente de l’Accorderie Paris Sud.

Cliquez ici pour accéder à la page Facebook de Garidell14 et ici pour accéder au compte Instagram de Garidell14

COQUA, pour redonner le goût du collectif à Pernety-Plaisance

Manifestation pour le retour des feux tricolores à Pernety (Sylvie Boudoulec à droite)

Alors que l’abstention aux différentes élections ne cesse de battre des records, nombreux sont celles et ceux qui continuent à vouloir s’impliquer dans leur vie de quartier, à l’intérieur ou hors du cadre institutionnel de la démocratie participative, pour améliorer la qualité de vie des citoyens-habitants. Nous avons rencontré Sylvie Boudoulec, la porte-parole de COQUA, un collectif rassemblant une centaine de personnes particulièrement actives dans notre barrio.

Un diagnostic sévère mais juste de la dégradation des conditions de vie à Pernety-Plaisance

La charte de COQUA (cliquez ici) détaille sur deux pages et demie les objectifs que s’est assignés le Collectif des habitants, usagers et riverains du quartier Pernety-Plaisance et qui s’articulent notamment, mais pas exclusivement, autour de la restauration d’une meilleure sécurité et d’une plus grande propreté dans notre Quartier. Sylvie Boudoulec, la porte-parole de COQUA, a exercé par le passé les fonctions de chef d’établissement dans plusieurs zones d’éducation prioritaire. Elle est donc également très sensible à la question éducative qui est souvent à la base des problèmes de délinquance et d’incivilité. Entourée d’une centaine de personnes dont certains sont des acteurs de la vie sociale, elle mène depuis plus de sept ans un combat résolu contre la dégradation des conditions de vie des habitants de Pernety Village. COQUA, qui se veut totalement indépendant des partis politiques et des groupements confessionnels, porte haut les valeurs et principes de pluralisme, de laïcité, de mixité sociale et défend ardemment la possibilité d’argumenter rationnellement dans les débats. Le collectif s’est affirmé ces dernières années comme un interlocuteur crédible de la Mairie du 14ème arrondissement et de la Préfecture de Police de Paris pour toutes les problématiques qui concernent la qualité de vie et la qualité de l’environnement dans notre Quartier. Lors des élections municipales de 2020, il a souhaité interroger les candidats en lice sur leur projet respectif pour notre arrondissement et a notamment pu rencontrer Mme Carrère-Gée ainsi que MM. Azière, Letissier et Villani sans toutefois réussir à obtenir audience auprès de la municipalité en place qui a été reconduite autour de Madame la Maire Carine Petit. “Nous ne fonctionnons pas mieux avec la nouvelle équipe municipale qu’avec l’ancienne, nous confie Sylvie qui déplore l’absence de réelle concertation entre les représentants de la municipalité et les habitants et usagers du Quartier. La concertation ne peut en aucun cas pas être confondue avec la communication et l’information diffusées unilatéralement par les autorités municipales ou la désignation par la Mairie de quelques individus comme seuls interlocuteurs valables sur un dossier, encore moins avec le recours à des commissions de conseils de quartier filtrant les propositions sans critère objectif de sélection.” Quand bien même elle s’est investie depuis peu à titre personnel au Conseil de Quartier Pernety avec lequel les “Coquaziens” auraient souhaité mieux collaborer ces dernières années, Sylvie n’en déplore pas moins les “dérapages” de la démocratie participative qui a notamment vu disparaître fin 2018 du conseil de quartier la commission Vivre ensemble, paix sociale et sécurité initiée en 2016 par COQUA et certains commerçants réunis au sein de l’association des Plaisanciers. Une autre illustration de ces “dérapages” est le refus affirmé de toute concertation avec les habitants non répertoriés comme handicapés sur le sujet devenu aujourd’hui obsolète de la suppression expérimentale des feux tricolores sonorisés. Le déni de démocratie s’accompagne parfois d’un déni de réalité lorsque, comme le déplore Sylvie, l’adjoint en charge de “la prévention, de la police municipale, de la tranquillité publique et de la Ville du quart d’heure” refuse de voir inscrire dans l’intitulé de sa charge le terme sécurité comme s’il n’acceptait pas de s’en voir attribuer officiellement la responsabilité alors que la sécurité s’est pourtant bien dégradée dans notre Quartier depuis quelques années en nourrissant le sentiment d’abandon et de déclassement des populations, notamment celles qui résident dans les cités HLM.

Apéro pour fêter la réactivation des feux tricolores avec les partenaires non voyants devant la librairie “Les Tropiques”

Des propositions et des actions concrètes pour remédier à la situation dégradée du Quartier

Pour pallier les manques et manquements de la municipalité – qui a néanmoins été dotée depuis novembre 2021 d’une police municipale (mais en effectif toujours actuellement insuffisant) – , COQUA se veut résolument constructif. “Nous ne sommes jamais seulement dans la critique et nous avons des propositions concrètes, insiste Sylvie. Et c’est pourquoi nous continuons à rencontrer un maximum de gens – des élus comme des personnes de terrain – pour continuer à nouer un dialogue fructueux”. La porte-parole de COQUA déplore toutefois qu’une partie des élus soit constituée d’anciens militants associatifs auxquels leur passé donne certes une légitimité mais qui n’ont aucune réelle idée de ce que peuvent représenter les contraintes liées à l’administration d’une commune de plus de 120.000 habitants dont ils partagent la charge avec la Mairie Centrale. “Il n’y a pas d’évaluation pour vérifier que les objectifs qu’on s’est fixés ont bien été atteints et il n’y a pas d’analyse globale et systémique, sans espace-temps intermédiaire entre le très court terme et une vision très lointaine et utopiste, des projets et idées portés. On ne s’improvise décidemment pas sans transition ni formation adjoint au Maire”, fait remarquer Sylvie. Pourtant, des solutions de bon sens existent, qui pourraient par exemples consister à auditer les associations subventionnées qui animent le Quartier ou font de l’accompagnement social et scolaire, ou bien à doter le Quartier Pernety d’un véritable centre d’animation pour les jeunes qui viendrait en complément de la ludothèque proposée par l’association Florimont. “Plutôt que d’affirmer une volonté pérenne de prendre les choses en main en assurant et en contrôlant la qualité des prestations fournies, la municipalité se contente le plus souvent d’un saupoudrage d’activités ponctuelles et à la carte qui ne satisfont en définitive personne”, regrette Sylvie. Un exemple caricatural de l’absence de réelle volonté municipale est illustré par le destin du voeu porté par COQUA qui a pourtant été voté en mars 2021 en Conseil de Paris et qui a trait à la prévention de la délinquance en prévoyant le financement de deux postes supplémentaires d’éducateurs spécialisés à la Fondation Jeunesse Feu Vert basée à Pernety-Portes de Vanves et d’Orléans. Ce financement n’a toujours pas aujourd’hui été débloqué et l’équipe Feu Vert attend depuis maintenant plus d’un an l’arrivée des deux nouveaux éducateurs qui continuent à cruellement lui manquer… Pour autant, COQUA ne prêche pas toujours dans le désert. Des liens fructueux ont ainsi été noués avec le commissariat de police du 14ème arrondissement et renforcés suite aux évènements du 14 juillet 2020 marqués par des affrontements entre jeunes du quartier et policiers. COQUA a été invité aux réunions qu’il organise et va être associé à un groupe opérationnel de prévention-sécurité destiné à élaborer des solutions pour chaque problème détecté en travaillant avec les acteurs de terrain que sont les établissements scolaires, les associations de locataires, les gardiens d’immeubles et le Groupement Parisien Inter-bailleurs de Surveillance (GPIS). “On veut passer d’un discours faussement rassurant qui exaspère les habitants du Quartier à des pratiques d’intervention et de construction (y compris de co-construction) réelle et qui donne des résultats”, nous assure Sylvie. Mais ce n’est bien évidemment pas le seul sujet sur lequel COQUA s’active, et le collectif est également très en pointe pour suivre les développements des nombreux chantiers qui se déploient jusqu’à Montparnasse dont notamment le projet de forêt urbaine place de Catalogne. Les renards ont intérêt à bien se tenir !

Pour contacter et/ou rejoindre COQUA, vous pouvez envoyez un email à 75coqua14@gmail.com. Vous pouvez aussi vous connecter au compte Twitter du collectif : @Coqua14.

Un Coin de Ciel pour préserver l’âme du Quartier Pernety

A un léger angle de rue, à deux pas du jardin des Thermopyles, s’est ouvert par la grâce de Guillemette Chénieux un nouveau Coin de Ciel dans le Quartier Pernety. L’atelier-galerie du 21 rue Boyer-Barret est un endroit hybride en phase avec l’esprit créatif de notre arrondissement, mais également soucieux d’en préserver l’âme associative. Nous en avons rencontré la responsable quelques jours avant le vernissage d’une des nombreuses expositions qui s’y succèdent (*).

La renaissance d’un lieu

Sur la page d’accueil du site d’Un Coin de Ciel (cliquez ici) figurent deux photos de la rue Boyer-Barret qui permettent de mesurer comment le passage des années peut transformer une artère de Paris. Le Coin de Ciel de Guillemette Chénieux est le résultat du réaménagement de deux anciennes boutiques de cette rue devenues vétustes : une boucherie-charcuterie (transformée plus tard en dépôt de livres) et un salon de coiffure de quartier. Lors de sa première visite des lieux, Guillemette tombe sous le charme de l’endroit qui, en plus d’être situé dans un Quartier auquel elle est restée très attachée pour y avoir longtemps vécu et travaillé, correspond bien au projet d’atelier qu’elle a en tête. Les travaux qui restent à réaliser pour lui redonner vie ne font pas peur à celle qui a fait carrière dans de grosses agences d’architecture parisiennes avant d’entamer une seconde vie d’enseignante. Elle va donc complètement le réhabiliter en en faisant un nouveau local spacieux et ouvert à la lumière, destiné à la promotion d’activités artistiques ou centrées sur le développement personnel et le mieux-être. Coin de Ciel est en effet tout à la fois un atelier et une galerie. “Mon envie est de perpétuer autant que faire se peut le côté polyvalent et hybride de ce lieu”, nous dit Guillemette. Les amies avec lesquelles elle l’anime sont toutes passionnées par la transmission de leur discipline et de leur expérience : initiation artistique pour les enfants ; gymnastique holistique, yoga, sophrologie et ateliers d’écriture pour les adultes. La diversité des enseignements qui y sont dispensés oblige à conserver l’espace propre et dépouillé, à même d’accueillir des groupes d’une dizaine de personnes occupés à différents types d’activités. Et c’est tout le talent de Guillemette, architecte DPLG et titulaire d’un troisième cycle de scénographie, d’avoir su en optimiser le design pour offrir aux différents intervenants dont elle promeut les activités le cadre idéal à l’épanouissement de leur talents personnels respectifs. “Lorsqu’il fait beau, il se passe aussi des choses sur le trottoir, ajoute Guillemette. J’ai obtenu un permis de végétaliser de la Mairie du 14ème pour deux jardinières, et Madame la Maire nous a également permis de disposer des petites tables et chaises pour offrir le thé ou le café au moment des vernissages”.

L’intuition comme guide

Car, en plus d’être un atelier, Coin de Ciel est aussi une galerie et s’affirme de plus en plus en tant que telle. L’activité exposition qui a pris de l’ampleur depuis le printemps dernier n’offre plus aucun créneau de libre avant novembre 2022. Guillemette a tout spécialement créé une structure associative avec une amie pour en assurer la bonne gestion. Elle choisit elle-même les artistes dont elle expose les oeuvres en prenant contact avec eux après les avoir suivis quelque temps sur Instagram ou bien après avoir été sollicitée par ceux qui ont eu vent de l’existence de l’atelier-galerie grâce au bouche à oreille ou sur les réseaux sociaux. “Pour le moment, je fais mon choix sans aucun a priori et en suivant ma seule intuition, nous indique Guillemette. Certains visiteurs réguliers me disent que ma personnalité se révèle à travers mes choix, mais je n’ai pour l’instant absolument pas conscience de ce qui s’en dessine en filigrane car je n’ai aucunement essayé de l’analyser. Je peux en réalité aussi bien être touchée par des peintures abstraites que par des choses très figuratives. Mais c’est également souvent lié aux personnes qui exposent car je n’imagine pas exposer quelqu’un avec qui je ne m’entends pas. Il y a en fait une adéquation entre ce que font les artistes, leur personnalité et la mienne, et très souvent les artistes exposants deviennent des amis.” La démarche de Guillemette est bien plus personnelle que commerciale. “Si je voulais faire de l’argent, je m’y prendrais tout autrement”, nous assure-t-elle. L’objectif de la fondatrice de l’association Coin de Ciel est plutôt de faire connaître les oeuvres d’artistes émergents dont la sensibilité épouse la sienne. L’alchimie ainsi créée aboutit à faire de l’atelier-galerie un endroit original et chaleureux qui accueille également ponctuellement certains petits évènements comme des marchés de créateurs, des concerts, ou encore des Nuits de la lecture. Allez absolument à la découverte de Coin de Ciel avant qu’il ne vous tombe sur la tête !

(*) Exposition Lili Lambert du 8 au 20 février 2022.

Cliquez ici pour accéder au site d’Un Coin de Ciel et ici pour accéder à sa page Facebook.

“Paris 14 Territoire de cinémas” : penser et agir pour un autre monde

L’association Paris 14 Territoire de cinémas a fêté ses quatre ans en novembre 2021 avec déjà à son actif quatre festivals de films organisés grâce au soutien financier de la Mairie du 14ème et des Conseils de Quartier. Son objectif reste de fédérer les cinq ciné-clubs et ciné-quartiers de notre arrondissement (le 32! Ciné, le Ciné-Kino ArtMele, le ciné-quartier Mouton-Duvernet, le ciné-club Pernety et le Club des cinéphiles de la Poste et d’Orange) afin de développer des projets qui font aimer et connaître le cinéma, mais également de porter haut des convictions et des valeurs. Coup de projecteur sur la structure et ses réalisations avec Isabelle Tantin, sa co-présidente, et Marie Labiste, sa chargée de communication.

Une tradition aujourd’hui centenaire

“La beauté du cinéma, c’est de pouvoir tenter quelque chose de différent”, affirme Clint Eastwood. Pourtant, face à la concurrence du DVD, de Netflix et des grands réseaux d’exploitation, y a-t-il encore une place pour le ciné-club qui est une autre façon d’appréhender et d’apprécier les oeuvres cinématographiques (*) ? C’était l’une des questions posées lors d’une table ronde organisée dans le cadre du troisième festival de films mis sur pied par Paris 14 Territoire de cinémas en 2020. Après “Les voisins font leur cinéma” (premier festival de 2018) et l’hommage à Jean Rouch (en 2019), ce troisième festival était plus particulièrement centré sur le thème des “Femmes au travail”. Mais il a également été l’occasion de célébrer le centenaire des ciné-clubs puisque l’idée de présenter des films et d’en discuter avec le public à l’issue de la projection a été “inventée” en 1920 au cinéma Les Ursulines dans le 5ème arrondissement de Paris. Le concept est-il pour autant toujours d’actualité à une époque qui voit triompher l’individualisme couplé à la technologie ? “Notre grande originalité par rapport au cinéma commercial reste la possibilité de discuter du film, plaide Isabelle Tantin. Et la discussion peut se faire en présence ou non d’intervenants extérieurs. Après la projection, nous échangeons tous ensemble 30 à 60 minutes, puis partageons parfois un verre ou un gâteau. Les gens se rendent au ciné-club un peu comme au café du coin. Mais, nuance-t-elle, notre public est en général plutôt cultivé et passionné de vieux films en plus d’être souvent amateur de théâtre et de littérature”. La rencontre de tous avec tous génératrice de lien social est parfois agrémentée par la présence d’intervenants extérieurs, d’acteurs ou de réalisateurs du 14ème arrondissement ou d’ailleurs. Car le 14ème, qui est l’arrondissement d’Agnès Varda et de Jacques Demy, est à lui seul un petit territoire très évocateur du 7ème art. Lors du dernier festival qui s’est tenu en 2021 sur le thème “Quand le cinéma imagine demain” et à l’occasion duquel Fahrenheit 451, le célèbre film de François Truffaut, a été projeté aux 7 Parnassiens (grâce au concours financier du Conseil de Quartier Montparnasse-Raspail), l’association a posé la question cruciale de la place de la culture et du cinéma dans la vie de tous. Nombreux furent les festivaliers qui purent en débattre lors de la table ronde animée par le réalisateur et metteur en scène Patrick Hadjahj. “Culture et cinéma sont essentiels dans notre vie : ils nous engagent à penser et agir pour un autre monde”, résume le dernier rapport d’orientations de l’association Paris 14 Territoire de cinémas où l’on a pu s’inquiéter de l’impact de la crise sanitaire sur la fréquentation des salles obscures.

Débat avec Patrick Hadjahj après la projection de “Fahrenheit 451” (octobre 2021)

Cinquième festival de films et nouvel outil de communication

Pour continuer à porter ses valeurs, l’association redouble d’énergie aussi bien sur le fond que sur la forme. Un cinquième festival de films est déjà en cours de préparation pour 2022. Plusieurs thèmes étaient en lice cette année : celui des frontières, celui des réalisateurs empêchés par la censure politique et celui de la jeunesse conquérant sa liberté qui est une thématique susceptible de drainer vers les ciné-clubs du 14ème un public renouvelé de jeunes spectateurs. La dernière réunion du conseil d’administration de Paris 14 Territoire de cinémas a finalement choisi le thème du “Cinéma passeur de frontières” comme fil rouge du festival d’octobre 2022. Afin d’assurer la fonction première de la structure fédérative qui est de faire circuler les publics d’un ciné-club à un autre, Marie Labiste, sa chargée de communication, capitalise sur les efforts déployés par Pascal Vaillant qui a créé le site internet commun à tous les ciné-clubs et ciné-quartiers (paris14cinema.fr) et optimisé l’utilisation des réseaux sociaux Facebook et Twitter pour faire connaitre l’association. Le nouvel outil (open agenda) dont elle a développé l’utilisation (cliquer ici) est dès à présent en mesure de promouvoir les activités des différents ciné-clubs en mode dématérialisé en détaillant de façon chronologique la programmation des films et des débats associés. Et un lien spécifique sur le site de la Mairie du 14ème est même envisagé qui pourrait venir consacrer la reconnaissance institutionnelle de Paris 14 Territoire de cinémas. Car les ciné-clubs associés ont déjà été intégrés par les instances municipales dans le cadre de la célébration du centième anniversaire de la mort de Georges Brassens à l’occasion de laquelle ont été projetés le film Porte des LilasL’Entrepôt) et le documentaire Le regard de Brassens (à l’Institut Protestant du boulevard Arago). Si, comme le dit Juliette Binoche, “le cinéma est un rêve que l’on rend possible”, alors Paris 14 Territoire de cinémas mérite sans doute un petit coup de pouce !

(*) Comme un symbole, Janine Bertrand, la fondatrice et présidente d’Inter Film qui fournit en films les ciné-clubs indépendants, s’est éteinte le 18 octobre dernier.

Rencontre avec Coline Serreau à l’occasion de la projection du film “La Crise” au festival 2021