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“Remous sous caillou”, l’autoportrait déglingué de Béatrice Giudicelli

Béatrice en dédicace à la bouquinerie La Vague à l’âme (Paris 20ème)

Mais qu’est-il donc arrivé à Béatrice Giudicelli bien connue des Quatorziens pour ses sympathiques portraits de personnalités marquantes du 14ème arrondissement de Paris ? Elle a publié en février de cette année Remous sous caillou, le récit d’un épisode maniaque intervenu quatre ans auparavant entre décembre 2019 et janvier 2020, juste avant le premier confinement. Elle s’y met courageusement à nu avec style et humour en contribuant à dédramatiser les troubles psychiques qui peuvent concerner tout un chacun à un moment donné de sa vie.

La drolatique narration de délires made in Paris 14ème

Un beau jour de décembre 2019, Béatrice Giudicelli acquiert l’intime conviction que notre monde, tel que nous le connaissons, ne représente qu’un monde parmi des milliards d’autres et, de fil en aiguille, finit par douter de sa propre existence. Le doute est le début de la sagesse, disait Aristote. Il est aussi le point de départ des Méditations métaphysiques de Descartes. Plutôt que de lâchement conclure “Je pense, donc je suis” et de passer à autre chose, Béatrice approfondit le cogito cartésien jusqu’à s’ouvrir les portes de la folie qui la fait percevoir les choses sous un oeil différent :  “C’est ainsi que dans mon environnement, tout me semblait étrange, écrit-elle. Une rue ne m’apparaissait ni chaque fois la même, ni chaque fois une autre. Je ne parvenais plus à savoir si j’étais dans un rêve ou dans la réalité.” Au point qu’un jour, elle se retrouve comme par magie dans le jardin pourtant toujours fermé qui jouxte la Fondation Cartier. “Mais heureusement, hormis celle de mon goûter dans mon sac, pas de pomme à croquer à l’horizon pour aggraver encore le sort de l’humanité” (!). Le ton est donné. C’est sous l’angle de l’humour et de l’auto-dérision que Béatrice se refait le portrait en ne nous épargnant, pour notre plus grand plaisir, aucun détail de ses délires made in Paris 14ème. De la description des folles “machines maléfiques” qui l’entourent à l’évocation des “SMS détonants” qu’elle envoie à ses proches et amis en passant par les “bouffées d’érotisme” qui l’assaillent, la portraitiste favorite des Quatorziens nous raconte par le menu toutes ses pensées décalées qui l’ont parfois conduite à sortir du cadre social établi et tacitement accepté de tous. Il y a dans Remous sous caillou force anecdotes réjouissantes de scènes qui ont, selon le cas, fait rire ou grincer des dents à La Coupole, au Rostand, à La Closerie des Lilas ou bien encore sur le lieu de travail de notre héroïne malgré elle. Jusqu’au jour où, sur la demande de ses proches, une ambulance “Béatrice” (ça ne s’invente pas) la conduise au Pavillon Piera Aulagnier de Sainte Anne où sont hospitalisés en psychiatrie tous les habitants du 14ème arrondissement qui présentent des troubles mentaux.

Entrée du Pavillon Piera Aulagnier

La pin-up de Piera Aulagnier

C’est aux écrivains du 14ème arrondissement que revient l’insigne privilège de laisser une trace écrite de ce qu’il se passe à l’intérieur du club très fermé du Pavillon Piera Aulagnier. Béatrice Giudicelli nous décrit de manière touchante le petit monde de ses compagnons de souffrance psychique : le beau Romain, Justine l’avocate, Maxime le blagueur un peu lourdingue, Janine et son sac jaune Gibert, Françoise et ses ui, Malika la star du Pavillon, Bernard le Bourdon, Cynthia la brindille, Bogdan le ténébreux sont quelques uns de celles et ceux qui constituent la faune très disparate au milieu de laquelle elle va évoluer pendant six semaines en attendant de pouvoir redescendre sur terre en rompant avec la phase euphorique qui l’avait emportée vers les territoires de la “folie”. Son séjour à Sainte Anne fut entrecoupé de plusieurs stages à l’Unité de Stabilisation (UBS) du 26 boulevard Brune où les médecins-psychiatres s’obstinaient à la trouver trop “up”, c’est à dire en gros trop perchée (la phase “up” signifiant phase euphorique en langage psy). “Il faut dire qu’à l’USB, j’étais clairement la plus “up”, voire même, sans fausse modestie, la plus pin-up“, note avec beaucoup d’humour Béatrice qui finira par trouver la clef qui déverrouille la porte du Pavillon Piera Aulagnier, ce “cocon douillet où l’on se répare avec et grâce aux autres“, patients comme soignants. Remous sous caillou est une plongée fort intéressante dans l’univers de la psychiatrie qui appréhende courageusement et sans tabou aussi bien les symptômes des troubles psychiques que les difficultés et les contraintes rencontrées pour les surmonter. Le livre a déjà été au centre de plusieurs débats qui se sont tenus à l’occasion de dédicaces organisées par son autrice dans quelques librairies parisiennes et sur l’Adamant, le bateau-hôpital psychiatrique de jour amarré quai de la Rapée. Vous pouvez en acquérir un exemplaire en le commandant en librairie ou en passant à la librairie Au plaisir des yeux située au n° 120 de la rue Raymond Losserand. Vous pouvez également le commander directement à Béatrice (contact : beagiudicelli@yahoo.fr).

Remous sous caillou, Editions Voix Tissées (collection C’est-à-dire), 45 pages, 7 euros.

“Remous sous caillou”, coup de coeur de la librairie “Au plaisir des yeux”

 

Rencontre avec Yann-Ber Tillenon au bar de “La Liberté”

Rencontre avec Yann-Ber Tillenon (à gauche) à la brasserie “La Liberté”

De quoi Yann-Ber Tillenon est-il le nom ? Vaste question et ce n’est certainement pas un esprit superficiel comme le nôtre qui pourrait en faire le tour. Pour pouvoir cerner le Président de Kervreizh, il faudrait en avoir l’épaisseur humaine. Et pour écrire un article complet et pertinent sur sa personne, y passer plusieurs jours ou semaines. De toute façon, personne ne le lirait car il serait beaucoup trop long tant il y a de choses à dire. Attendons plutôt que ce Quatorzien de choc écrive ses mémoires ! Pour l’heure, force est de reconnaître que rencontrer Yann-Ber Tillenon à la brasserie La Liberté est aussi désaltérant que boire un verre d’eau après avoir traversé le désert de Gobi. Car Yann-Ber reste une authentique oasis de fraîcheur (bretonne) dans un monde uniformisé où tout le monde s’ennuie. Retour aux sources pour un blogueur Breton qui s’ennuie.

Les raisons d’apprendre le breton post-moderne

De quoi Yann-Ber Tillenon est-il le non ? Il n’est certes pas un béni-oui-oui, comme nous avons pu le constater dès nos premiers échanges au bar de la brasserie La Liberté de la rue de la Gaîté. Nous ne connaissions pas Yann-Ber avant cette première rencontre impromptue quand bien même nos amis de Figures du  XIVe lui ont déjà consacré un éclairant premier reportage (cliquez ici). A peine partagés quelques propos qui n’ont pas manqué d’évoquer chez lui certains souvenirs de son passé de militant de l’identité, de la culture et de la langue bretonnes, Yann-Ber nous a invité à nous rendre à Kervreizh, son second repère du boulevard Edgar Quinet où il tient la “galerie européenne” dont il est le président. Il nous y a très gentiment offert et dédicacé le dernier cahier de l’Emsav, “ce mouvement créateur de “Breizh” qui est un germe de nouvelle autorité spirituelle bretonnante fédérée dans la grande Europe pour remplacer l’autorité de la Bretagne provinciale francisée par la République centraliste jacobine française matérialiste“. Ce mouvement a une langue qui est le breton unifié post-moderne créé par quelques éminents linguistes locaux à partir des quatre grands dialectes survivants en Basse-Bretagne. “Cette nouvelle langue de l’Emsav futuriste, mouvement d’artistes, poursuit Yann-Ber, est une langue révolutionnaire au sens étymologique en ce qu’elle illustre un retour des valeurs véhiculées par le breton de l’Antiquité romaine vers la future Grande Europe renaissante”. Avis aux bretons amateurs que nous invitons à rendre visite à Yann-Ber pour en savoir plus ! Centralistes jacobins s’abstenir…

Une association placée sous la bannière d’un artiste fédérateur et fédéraliste

Il est sans doute préférable dans un article de grande vulgarisation de nous concentrer sur l’homme. De quoi Yann-Ber Tillenon est-il le oui ? Une rapide revue de son site très fourni (cliquez ici) peut nous aider à nous en faire une première idée. On y découvre que cet ancien légionnaire, vétéran du pacifique, est aussi disciple de druide et un artiste-peintre accompli. Rien ne lui fait moins peur que la réunion des “contraires” car “la véritable Métaphysique celtique, européenne, comporte une multitude de points de vue. Ils rendent compte de tous les aspects sous lesquels on peut envisager la Vérité. Elle ne saurait donc être contenue dans les limites d’un “système” du “prêt à penser” d’un gouvernement unique à pensée unique, dans une langue unique, une culture unique, pour un pouvoir unique de la dictature du “politiquement correct”, sans “dérapages” hérétiques, héritée du monothéisme judéo-chrétien à vérité unique”. Fédérer les contraires vers l’idéal national “Brezhon” européen qui se trouve au sommet de la pyramide les contenant tous, tel est son crédo et son constant objectif. On ne s’étonnera dès lors pas d’avoir vu Yann-Ber rencontrer et échanger avec des hommes et des femmes couvrant la totalité du spectre politique aussi bien qu’artistique (cliquez ici). Le sectarisme, très peu pour lui ! Le fédéralisme plutôt. Or “le meilleur moyen d’être fédéraliste c’est de le pratiquer soi-même dans sa vie et dans la société française centraliste, dualiste, manichéenne, dont fait partie la Bretagne. En se changeant soi-même, on peut changer une petite partie de la société dans laquelle nous sommes, et puisqu’on est dedans proposer autre chose.” Ne pas artificiellement opposer les contraires, c’est aussi réconcilier traditions et modernité dans une démarche “archéo-futuriste” où la coiffe de la bigouden (que ne porte pourtant pas Céline Hervieu, notre toute nouvelle députée du 14ème) ne craint pas de se frotter à la fusée de Jean-Loup Chrétien. Cette démarche est d’ailleurs au coeur de la dernière école artistique créée par Yann-Ber sous la forme d’une nouvelle association (“L’archéo-futurisme”) dont l’objet est de complètement révolutionner la société pour créer une nouvelle civilisation plus conforme à la tradition indo-européenne qui donne le vrai pouvoir aux philosophes plutôt qu’aux marchands. Comme tous les artistes authentiques, Yann-Ber Tillenon est en réalité un monde à lui tout seul dont vous pourrez contempler quelques parcelles en allant découvrir ses toiles à la galerie européenne Kervreizh.

Kervreizh, galerie européenne – 5 boulevard Edgar Quinet – 75014 Paris.

Yann-Ber Tillenon à la galerie européenne Kervreizh (photo YB)

Meksa Yadadene entre le 3ème art et “Le 7ème Art”

Meksa, derrière le bar du “7ème Art”

A Pernety 14, nous avons un flair infaillible pour repérer les plus sympathiques habitants et usagers du Quartier. Meksa Yadadene en fait définitivement partie. Il nous accueille toujours avec le sourire au café Le 7ème Art qui fait l’angle de la rue Raymond Losserand et de la rue Francis de Pressensé où se situe L’Entrepôt bien connu des cinéphiles du 14ème. Un matin, entre deux cafés, le jeune kabyle à peine trentenaire nous a appris qu’il était en réalité bien plus branché peinture que cinéma.

Une formation à la peinture totalement algérienne

A une centaine de mètres à vol d’oiseau du kiosque-atelier de Sedigheh Farhrat se cache donc sous les apparences les plus ordinaires d’un serveur de bar un autre spécimen d’artiste qui fait honneur à la tradition artistique centenaire de Montparnasse. Meksa Yadadene a rencontré le 3ème art (la peinture) dans sa Kabylie natale en peignant sur les tables du collège au grand désespoir de ses profs. Son désir de création s’est également exprimé en sculptant des figurines animalières sur les bouts de bois qu’il ramasse au hasard de ses promenades. Meksa est à cette époque complètement autodidacte car il ne peut bénéficier d’aucune structure d’éveil à l’art dans son village d’Azeffoun en Kabylie, une région artistiquement beaucoup plus volontiers tournée vers la musique. Ses rêves de jeunesse le poussent de toute façon plutôt vers le football et Meksa n’hésite pas à faire deux heures de route à pied pour se rendre aux entrainements de son club jusqu’au jour où une blessure ne vienne malheureusement faire le deuil de ses ambitions sportives. Après le bac, il s’inscrit à la fois à la faculté de sciences et technologies de l’université Mouloud Mammeri de Tizi-Ouzou et à l’école régionale des beaux-arts d’Azazga qu’il fréquente pendant un an en devenant major de promo. Puis il s’ouvre à d’autres horizons artistiques à l’école supérieure des beaux-arts d’Alger dont il suivra les cours pendant cinq années supplémentaires. Il y entretient de très bonnes relations avec ses professeurs qui sont pour la plupart tous des artistes qui repèrent rapidement son talent de peintre. Certains d’entre eux deviennent des amis comme Karim Sergoua ou encore Smaïl Ouchène qui sera par la suite son directeur de recherches. A Alger, il s’initie par ailleurs avec beaucoup d’enthousiasme aux différentes techniques de gravure. S’il connait bien sûr les oeuvres de M’hamed Issiakhem, le célèbre peintre algérien également originaire de Kabylie, Meksa développe une vision universaliste de l’art qui va le conduire à s’intéresser tout particulièrement aux peintres expressionnistes allemands. Il finira par décrocher son diplôme de Master 1 en présentant un projet artistique comprenant plus de cinquante tableaux sur la thématique de l’expression du cri contemporain.

Phosphoresé, 120x100cm, huile sur toile (photo MY)

En quête d’un second souffle parisien

Arrivé en France en 2022 avec le statut d’étudiant, Meksa s’inscrit en Master Art contemporain et sciences humaines à l’Université de Paris 8. Pour financer ses études, il travaille d’abord comme garçon de café à La Brouette, le bar de l’avenue du Maine, puis au 7ème Art grâce à l’aimable entremise de Mourad qui travaille au Losserand Café. Les obstacles rencontrés sur sa route pour s’installer et se stabiliser à Paris ont un peu brisé son allant et sa créativité alors qu’il était devenu un peintre très prolifique en Algérie. Il continue néanmoins à dessiner et à fixer certaines de ses nouvelles idées en réalisant des petits croquis. Cette rupture dans son parcours artistique lui a fait prendre du recul par rapport à l’enseignement qu’il a reçu et qu’il continue de recevoir à Paris 8. Il ne trouve en effet plus aujourd’hui son inspiration dans les peintres classiques et académiques qui étaient les références de sa jeunesse et est maintenant bien plus sensible aux travaux des expressionnistes qu’il avait commencé à découvrir avant de quitter l’Algérie pour la France. “Ce sont des peintres qui utilisent des couleurs violentes et des lignes acérées pour soumettre la réalité aux états d’âme de l’artiste, analyse Meksa. Ils travaillent dans la spontanéité et la fulgurance des idées, mais leur geste est à la fois spontané et réfléchi, ce qui peut paraître contradictoire à première vue. En réalité, ils réussissent à force de travail à acquérir une maîtrise de la gestuelle qui leur permet d’exprimer leurs émotions sur leurs toiles et qui m’impressionne personnellement beaucoup”. Quand je lui demande quels sont ses peintres favoris, le nom du peintre autodidacte britannique Francis Bacon est celui qui lui vient le premier à l’esprit : “J’aime beaucoup la violence et la colère qu’expriment les toiles de Bacon qu’on pourrait qualifier de néo-expressionniste puisqu’il en est en réalité le dernier représentant de ce courant de peinture. J’apprécie aussi le norvégien Edvar Munch et l’allemand Otto Dix”. Meksa en vient aujourd’hui à douter de l’utilité d’entreprendre des études d’art avant de se jeter à corps perdu dans la création picturale : “Je suis maintenant convaincu qu’il n’est pas nécessaire d’avoir étudié pour se mettre à peindre. Il faut juste en avoir la volonté, travailler très dur, et guetter le moment propice à la création”. Ce moment privilégié reviendra-t-il à Paris pour Meksa ? Il est en tout cas émerveillé de constater à quel point les nombreuses structures présentes dans notre pays (écoles d’art, galeries d’exposition, etc.) favorisent l’éclosion des talents artistiques. Lui, qui n’a pour l’instant jamais exposé en France, aimerait retrouver sa pleine motivation pour également pouvoir en profiter. Puisse ce cri du coeur aider à faire évoluer les choses en sa faveur !

Nefiste, 170x120cm, huile sur bois (photo MY)
Inconnu 01, Eau-forte sur plaque de cuivre (Epreuve d’artiste), 20x30cm (Photo MY)

Alison Fleck, passion savon

Baba porte très bien son nom car c’est exactement l’état dans lequel on reste après avoir rencontré Alison Fleck qui tient sa boutique de “savonnier-patissier” place Marthe Simard à la porte de Vanves. Comme elle nous a senti un peu vaciller, Alison n’a pas hésité à donner le coup de grâce en nous offrant un savon. Car la dame est bien trop classe pour seulement en “passer un” à ceux qui ne pensent qu’à se faire mousser avec leurs articles de blog…

L’exigence et le dépassement de soi comme moteurs

“Oh, j’voudrais tant / J’voudrais tant coincer la bulle dans ta bulle”. En écoutant un peu plus d’une demi-heure la douce voix d’Alison Fleck, nous avons moins pensé à un baba au rhum qu’à un week-end à Rome. Alison coche toutes les cases pour devenir citoyenne d’honneur de notre arrondissement. Cette native du 14ème est en effet autant une artiste qu’une artisane et autant une entrepreneure qu’une associative – en plus d’être soucieuse d’écologie, de produire français, de transparence et de partage. Elle a ouvert Baba, sa boutique de “savonnier-pâtissier”, il y a aujourd’hui trois ans sur la place Marthe Simard à la Porte de Vanves. Pour rien au monde elle ne voudrait quitter ce quartier prioritaire de la politique de la ville où elle produit des savons “haute couture” inspirés des techniques de la pâtisserie. Dans une vie antérieure, Alison fut en effet pâtissière haut de gamme dans des groupes de luxe et des palaces. Son CAP de pâtisserie en poche, elle est formée dans la vénérable et stimulante école de la Maison Lenôtre avant d’avoir le privilège de travailler au contact de Christophe Michalak vainqueur en 2005 de la Coupe du Monde de Pâtisserie qui l’initie aux charmes et aux exigences de la cuisine ouverte mettant en scène les pâtissiers au vu des passants derrière les vitrines de la cuisine. “C’est une façon de s’élever et de constamment se dépasser, témoigne Alison. Pouvoir se mettre en position de ne jamais se relâcher est une vraie force car le relâchement est malheureusement notre pente naturelle. Mon objectif personnel a toujours été de constamment m’améliorer – dans ma discipline aussi bien que dans les autres domaines de ma vie.” Pour autant, l’exigeante pratique de la pâtisserie haut niveau ne manque pas à Alison depuis qu’elle a troqué une passion pour une autre en devenant savonnière. “Je retrouve dans le savon tout ce que j’aimais dans la pâtisserie : transformer des belles matières premières, jouer sur les textures et les odeurs – et surtout faire plaisir aux autres car c’est bien sûr cela l’objectif ultime d’un artisan dans la mesure où nous ne transformons ni ne produisons pour nous-mêmes”. 

Le Savon “Opale” que nous a généreusement offert Alison

Une savonnière reconnue et soucieuse de partager son savoir

De la technique de confection des savons nous ne savons bien sûr rien. Alison se lance dans une très savante explication sur la saponification à froid, une technique qui permet de ne pas chauffer le savon pour respecter les matières premières et préserver leurs propriétés. En restant naturellement glycériné et surgras, le savon libère lors du lavage les bienfaits des éléments incorporés et hydrate mieux la peau qu’un savon industriel. Nous sommes très vite largués pour ne pas dire complètement noyés par les détails de l’explication technique et de la description des spécificités des produits vendus, de la même façon que lorsque nous nous rendons chez nos cavistes préférés pour acheter une bonne bouteille de vin. “Tous ceux dont je vous ai parlé sont des bons produits, nous rassure Alison en guise de conclusion. A partir du moment où le savon respecte votre peau et qu’il lave, ce n’est au final qu’une question d’émotion et de goût.” Nous n’en invitons pas moins tous les Quatorziens à venir lui rendre visite à la porte de Vanves pour compléter les informations qu’ils pourront utilement glaner sur le site internet de la boutique (cliquez ici). Alison organise par ailleurs le weekend dans son local de 70 m² des ateliers sur site pour faire découvrir les secrets de la fabrication artisanale de savon. Un cours en ligne est également disponible, qui connait un très grand succès auprès de ses 10.000 élèves en proposant plus d’une heure trente de vidéo avec des tutoriels complets sur différentes techniques de décors (cliquez ici). Enfin, Alison est l’autrice de deux livres édités à plus de 10.000 exemplaires sur les savons naturels et les cosmétiques naturels (cliquez ici). Forte de ses plus de 200.000 savons vendus et de ses 40 revendeurs en France et à l’étranger, notre savonnière jouit aujourd’hui d’une renommée nationale et même internationale. “Aujourd’hui, je vends tout ce que fabrique et je n’ai pas beaucoup de stock”, nous déclare-t-elle.

Savons décoratifs Halloween pour amateurs de Catacombes (photo Sidonie Deschamps)

Circuits courts et engagement collectif

Ce n’est pourtant pas faute de continuer à brider son succès en se refusant par souci écologique à recourir massivement au fret notamment aérien. Alison entend bien plus continuer à favoriser les circuits courts auprès des consommateurs locaux comme par exemple l’Hôtel Mercure Paris Montparnasse sur le boulevard Raspail ou bien encore l’Hôtel BOB de la rue Pernety qui projette de lui passer commande de savons dans le cadre d’un renouvellement de gamme pour son spa. Elle aime et favorise le contact direct avec ses clients qui peuvent aussi bien être des musées (elle s’apprête cet après-midi à livrer la boutique des musée des Catacombes de Paris) que des touristes, des élèves ou des professionnels de l’hôtellerie passant par Paris (comme Léna qui vient ce matin de Bourgogne pour faire provision de savons pour sa grande chambre d’hôtes de luxe). Alison, qui se sent plus productrice que commerçante dans l’âme, entend être le moins possible contrainte par les problématiques de transport. “Plus c’est local en soi, plus je suis heureuse, insiste-elle en se comparant volontiers à une agricultrice soucieuse d’écouler sa production dans le cadre de circuits courts. “Si nous nous organisons tous comme ça par arrondissement et même si ce ne sont sans doute que de petits battements d’ailes de colibris, nous pouvons quand même faire de petites choses pour la planète”, ajoute-elle. Pour preuve de son engagement local, Alison a récemment pris part à un petit marché au jardin des Thermopyles et participera le 21 septembre prochain à l’inauguration de la place de Catalogne avec d’autres acteurs de l’arrondissement dont les AMAP du 14ème. Autant d’occasions de se faire connaître localement pour celle qui est également engagée au sein du collectif d’artisanes et commerçantes Les Fabriques Paris 14 qui se propose en lien avec de la Mairie du 14ème de mettre en lumière les savoir-faire artisanaux et certains produits fabriqués dans le Grand Paris. La Mairie d’arrondissement n’a d’ailleurs pas manqué d’identifier la savonnerie Baba dans sa récente carte éditée en collaboration avec Le Routard qui met en relief les pépites et les endroits remarquables du 14ème. Alison a pu également compter sur le soutien de Madame la Maire Carine Petit pour organiser à la Porte de Vanves devant la boutique Baba un petit marché de producteurs locaux ayant vocation à animer la place Marthe Simard devenue depuis quelque temps un peu plus vivante le samedi matin.

La saponification à froid (photo Clément Duquennes)

Des produits 100% français

Cerise sur le gâteau de savon pâtissier, les matières premières utilisées pour la confection des savons Baba sont issues de l’agriculture biologique, sans huile de palme ni plastique, et également complètement françaises. “Nous faisons absolument tout en interne, nous explique Alison. De la transformation des produits à la fabrication des savons qui a lieu au sous-sol de la boutique comme de l’emballage qui est biodégradable ou réutilisable à la vente. Nos produits sont donc absolument tous 100% français jusque dans le papier ou les étiquettes utilisés. Quand j’utilise des plantes qui poussent en France, je les achète toutes françaises que ce soient les lavandes, le calendula ou l’ortie, même s’il m’arrive bien sûr d’utiliser des produits exotiques importés comme l’huile de coco ou le beurre de karité que j’utilise pour rendre le savon bien dur. Les personnes nécessaires à l’analyse des produits sont de même basées en France et les séchoirs indispensables à la fabrication à froid également localisés dans le sous-sol de la boutique.” Bien évidemment, le coût du produit fini s’en ressent, mais l’entreprise qui emploie aujourd’hui trois personnes a trouvé sa clientèle comme en atteste les résultats des ventes en France et à l’étranger. Succès sans aucun doute mérité pour un produit de niche (mais pourtant pas de riche) réalisé par une passionnée qui pousse le perfectionnisme jusqu’à le tailler à la main comme un bijou ou un objet d’art. Alors, pour savonner la planche de vos rivaux ou de vos collègues de travail, utiliser plutôt un savon industriel ! Le matin sous la douche, un savon baba, c’est nettement plus cool…

Cliquez ici pour accéder au site internet de baba savonnier pâtissier.

Atelier de team building à Paris : pour une cohésion d’équipe exceptionnelle

Drawing House, un endroit à découvrir d’art d’art

Chambre des étages 1 à 3 – Crypta par Mathieu Dufois (photo Gaelle Le Boulicaut)

Imaginez, imaginez juste une seconde que vous n’ayez plus qu’une semaine à vivre dans le 14ème arrondissement de Paris. Où iriez vous, avec votre bien-aimé(e), pour faire honneur à sa tradition artistique centenaire ? A la Drawing House bien sûr ! Viste guidée de ce boutique hôtel 4 étoiles avec Steven Vandeporta, directeur de la communication et des projets artistiques et Ysée Rocheteau Szkudlarek, chargée de la communication et des partenariats.

Le projet Drawing

Autant le dire tout de suite, nous ne sommes pas, à Pernety 14, très familiers des hôtels 4 étoiles… C’est pourquoi nous avons attendu bien sagement à l’accueil de l’hôtel situé au 21 rue Vercingétorix que Steven et Ysée nous rejoignent pour notre rendez-vous de 16 heures. Steven a eu tôt fait de nous mettre à l’aise en se lançant dans une présentation générale du projet de la Drawing Society. La Drawing House en est le deuxième établissement hôtelier qui a ouvert ses portes en 2022, cinq ans après le Drawing Hôtel situé au 17 rue de Richelieu dans le premier arrondissement de Paris. A l’origine du projet se trouvent deux Quatorziennes, Christine Phal et Carine Tissot, mère et fille et toutes deux collectionneuses passionnées de dessin contemporain. Après une vie de galeriste, Christine Phal ouvre en 2017 au 17 rue de Richelieu le Drawing Lab, un lieu de création artistique dans lequel sont organisées trois expositions par an et au dessus duquel il est prévu d’aménager une structure hôtelière. Carine Tissot propose alors la création d’un premier boutique hôtel artistique, le Drawing Hôtel, qui inaugure au centre de Paris la Drawing Hotels Collection en mettant à l’honneur cinq artistes dans chacun des cinq étages dont il est pourvu. Après ce premier succès, un second hôtel d’une capacité trois fois plus grande de 143 chambres réparties sur neuf étages va s’ouvrir en juin 2022 au 21 rue Vercingétorix dans le 14ème arrondissement de Paris. C’est fondamentalement la passion du dessin contemporain qui se trouve à l’origine de ces réalisations entrepreneuriales. Car au-delà d’un projet hôtelier, la Drawing Society porte un projet artistique né il y a dix huit ans de la Drawing Now Art Fair, un salon du dessin destiné aux galeries promouvant les artistes dessinateurs et qui se tient chaque année sur le carreau du Temple (au 4 rue Eugène Spuller dans le troisième arrondissement). “Nous accueillons chaque année à l’occasion de cette foire, qui est l’évènement phare à l’origine de notre notoriété, entre 70 et 75 galeries internationales qui elles-mêmes présentent quelques 300 artistes dessinateurs, soit environ 2.000 dessins”, nous précise le directeur artistique.

Un hall d’entrée tout en couleurs à l’honneur de Joséphine Baker (photo Gaelle Le Boulicaut)

Un nouvel espace entièrement dédié au dessin contemporain

L’esprit Drawing hante l’hôtel du 21 rue Vercingétorix que Steven et Ysée nous font maintenant visiter. Comme pour trancher avec la façade grise et un peu austère de l’immeuble, la Drawing House affirme dès l’entrée son identité de boutique hôtel artistique en accueillant ses visiteurs avec une oeuvre monumentale et tout en couleurs de six mètres de haut signée Alexandre & Florentine Lamarche-Ovize qui est un hommage en forme de portrait robot à Joséphine Baker, icône des années folles de Montparnasse. Nous passons devant la réception éclairée par des lampes ornées de céramiques en forme de feuilles de bananier qui ont été imaginées par le même couple d’artistes pour rendre le lieu plus accueillant et chaleureux. Puis nous descendons jeter un oeil au Drawing Hall qui a été pensé comme un lieu de rencontres et d’échanges accueillant des expositions temporaires sous la forme de collaborations, et à côté duquel se trouve un espace bien-être et piscine investi par l’artiste Marion Charlet. En réalité, comme nous allons pouvoir le constater dans la suite de notre visite, le dessin contemporain s’invite dans tous les espaces et recoins de la Drawing House – de la moquette aux papiers peints et des couloirs aux chambres. Les neuf étages de l’hôtel auxquels nous accédons maintenant appartiennent à trois univers artistiques très différents dont le dossier de presse du boutique hôtel (cliquez ici) rend très bien compte en détails. L’on passe du très sombre de Crypta inspirée des expéditions nocturnes de Mathieu Dufois dans la forêt de Lascaux (étages 1 à 3), à l’onirique de la balade des vents de Karine Rougier (étages 4 à 6), pour atteindre à l’aérien d’Elisée, une géographie (Colombie) conçue par Alexandre & Florentine Lamarche-Ovize (étages 7 à 9). Carine Tissot, la directrice de la Drawing Society, a donné carte blanche à ces artistes dessinateurs pour la réalisation d’une oeuvre originale qui s’installe aussi bien sur la tête de lit des chambres que dans les couloirs de l’hôtel.

Couloir des étages 7 à 9 – Elisée, une géographie par A. & F. Lamarche-Ovize (photo Gaelle Le Boulicaut)

“Dessine-moi un hôtel !”

Redescendons un instant sur terre. Pour se familiariser avec la Drawing House avant peut-être d’y réserver une chambre de rêve, plusieurs solutions s’offrent aux Quatorziens : voir, écouter, boire et manger. Le Drawing Hall, qui est l’espace d’exposition de l’hôtel, est ouvert à tous tous les jours au niveau -1 et très facilement accessible immédiatement en face de la réception. Toujours au niveau -1, jouxtant la salle de sport (réservée, de même que la piscine, aux clients de l’hôtel), le nouvel espace de jeux This is blind test qui est ouvert à tous comblera les amateurs de musique. Il leur suffira de réserver un créneau seul, en famille, entre amis ou entre collègues pour accéder à trois salles différentes qui permettent de s’exercer à la pratique du blind test. Vous pourrez sans doute fêter vos exploits réalisés à ce “sport musical en plein boom” en buvant un verre au bar de l’hôtel qui donne sur une véranda. Le restaurant de la Drawing House offre quant à lui un bon compromis entre nourritures terrestres et spirituelles : sous l’oeuvre suspendue de l’artiste colombien Daniel Otero Torres mêlant dessin, sculpture, céramique et peinture et qui représente une volière d’animaux en voie de disparition, il propose du lundi au vendredi une formule déjeuner à 19 € (entrée/plat ou plat/dessert) ou 23 € (entrée/plat/dessert) si vous optez pour le menu de la semaine – et aussi, et peut-être surtout, les samedis et dimanches, une très bonne et généreuse formule brunch (buffet à volonté) qui ne court pas les rues du 14ème arrondissement de Paris. Ajoutons que des réunions d’entreprises peuvent également être organisées dans des salles spécialement dédiées : huit “ateliers de création” investis par la dessinatrice Lucie Picandet dont l’univers artistique onirique et spatial ne manque pas d’évoquer Le Petit Prince d’Antoine Saint-Exupéry. D’autres évènements sur mesure (mariage, communion, etc.) peuvent également être organisés pour la clientèle locale. La Drawing House, un magnifique dessein !

Cliquez ici pour accéder au site internet de la Drawing House.

Daniel Otero Torres met en appétit les amateurs de brunch dans le lounge de la Drawing House (photo Drawing House)

Le Routard pose son sac dans le 14ème arrondissement

La carte en format poche 9 cm x 17,5 cm dans toutes les bonnes adresses du 14ème

Les Quatorziens disposent dès cet été d’un nouvel outil pour découvrir leur arrondissement grâce au Routard qui publie en collaboration avec la Mairie du 14ème non pas un guide mais une carte gratuite et documentée qui les aidera à tirer un profit maximum de toutes les richesses immédiatement alentours.

Pépites, perles et bijoux du 14ème

Si, comme nous, vous êtes fauchés comme les blés, la solution peut consister à rester cet été à Paname pour découvrir ou redécouvrir le 14ème arrondissement. Pour vous aider, Le Routard et la Mairie du 14ème ont travaillé ensemble à l’élaboration d’une carte documentée qui met en relief les pépites de notre arrondissement et tous les lieux qui présentent un intérêt touristique. Cette publication tirée à plusieurs dizaines de milliers d’exemplaires est offerte gratuitement par la Mairie du 14ème à tous les Quatorziens et touristes francophones curieux d’un “Paris authentique et secret, qui mêle habilement douceur et art de vivre”, comme on peut le lire au verso de la couverture de la carte dépliante. Malheureusement pour nos touristes japonais ou étrangers, la carte du Routard n’existe qu’en version française ! Notez qu’il vous est également loisible de découvrir ce Paris peu connu et pourtant si vivant grâce aux deux très belles balades audio-guidées (en version française et anglaise cette fois-ci) de notre ami Thomas, alias Comte de Saint Germain, qui offriront plus de profondeur culturelle et historique à l’appréhension des merveilleuses richesses que recèle notre cher 14ème arrondissement.

Cliquez ici pour notre article consacré à l’excentrique Comte de Saint-Germain, ici pour accéder à son site officiel, et ici pour accéder à ses balades sur le site de VoiceMap.

La carte Routard 14ème dépliée

Daisy Le Dez remet le couvert à Notre-Dame de Bon Secours

Les étranges désirs de Daisy Le Dez (cliquez ici) sont toujours des ordres. Nous étions malheureusement indisponibles pour le vernissage de sa troisième exposition qui a eu lieu le 8 juin dernier au 68 de la rue des Plantes sur le site de l’hôpital Notre-Dame de Bon Secours. Mais nous n’avons pas résisté un mois plus tard à l’appel du P’tit Café qui accueille jusqu’à la fin du mois d’août vingt quatre de ses nouvelles oeuvres.

Une approche différente de la peinture

Devant un petit café donc (gentiment offert par Daisy), nous reprenons le fil de notre discussion entamée à l’été 2022 à l’occasion de Totémique, sa première exposition à Notre-Dame de Bon Secours. Que s’est-il passé en deux ans ? Plutôt que de parler d’évolution, Daisy préfère parler d’approche différente de la peinture. “J’ai eu une période qui se rapprochait de l’art brut, de l’art singulier, dont je suis en train de sortir, nous dit-elle. Mon travail, qui est aujourd’hui plus peaufiné et plus clair que ce que j’ai pu donner à voir précédemment, sollicite moins l’imagination de ceux qui regardent mes toiles. Je continue malgré tout à toucher un peu à tout car c’est toujours le même désir de liberté qui guide mon pinceau et qui m’aide – tout particulièrement par l’utilisation des couleurs – à sublimer la relative noirceur de mon environnement. Mais mon souhait est aujourd’hui de faire partager aux autres le plaisir que j’ai à peindre”. Les vingt quatre nouvelles toiles que Daisy a sélectionnées pour cette troisième exposition ont été spécialement conçues pour être exposées au P’tit Café dans le but d’en faciliter l’accrochage pensé par Marylène qui est bénévole à la Maison des Thermopyles. Vous avez donc jusqu’à la fin du mois d’août pour venir les contempler en profitant de l’occasion pour déguster les délicieux cookies proposés par toute l’équipe réunie autour de Mickaël. A défaut de cadavres exquis…

“La maison d’en face”, coup de coeur de Pernety 14.

Trois questions à Maud Gatel, députée sortante de Paris

Nos temps teintés d’antiparlementarisme nous ont presque fait oublier à quel point le métier d’élu de la nation pouvait être passionnant et utile. Maud Gatel, en campagne éclair pour sa réélection à la fonction de députée dans la 11ème circonscription de Paris, a bien voulu répondre aux trois questions que nous nous posions avant d’aller accomplir notre devoir de citoyen les dimanches 30 juin et 7 juillet 2024 prochains.

Pourquoi est-il si important de voter pour un représentant du “bloc central” à l’occasion des élections législatives à venir ?

Parce que ni le Nouveau Front Populaire ni le Rassemblement National ne représentent des alternatives crédibles et responsables pour permettre à notre pays de faire face aux nombreux défis qu’il va devoir affronter au premier rang desquels se trouvent la guerre en Ukraine, la lutte contre l’inflation, la crise climatique et la préservation de notre modèle social. Le nouvel élan que nous devons aujourd’hui retrouver ne peut en aucun cas venir des extrêmes dont le seul programme se résume à accentuer les divisions de la société et à dépenser des milliards que nous n’avons pas. La dissolution décidée par le Président de la République a eu au moins ce mérite de dévoiler les cartes des uns et des autres. Personnellement, je suis scandalisée par l’alliance des républicains de gauche pour lesquels j’ai le plus grand respect avec les élus de La France Insoumise sous la coupe desquels ils ont accepté de se placer dès 2022 au sein de la NUPES et aujourd’hui donc dans le cadre du Nouveau Front Populaire. Ce nouveau cartel électoral, qui constitue à mes yeux une véritable faute morale, ne mène qu’à une escalade de promesses démagogiques inefficaces et même contre-productives sur le coût faramineux desquelles les différents partis de gauche s’écharpent aujourd’hui en plus d’être en profond désaccord sur les domaines aussi fondamentaux que la transition écologique et la place du nucléaire ou bien, autre exemple, la défense européenne. Le Rassemblement National dans lequel les authentiques héritiers du gaullisme ne peuvent bien sûr pas se fondre représente une autre impasse et l’on constate aujourd’hui à quel point la perspective d’exercer le pouvoir le fait complétement reculer sur certaines promesses qui ont pu constituer son fonds de commerce électoral dont celle phare du retour à la retraite à 60 ans. Il nous faut aujourd’hui refonder avec les élus français responsables une nouvelle majorité parlementaire, républicaine et pluraliste à l’image de la France, ce qui implique de complètement reconsidérer notre façon de travailler avec celles et ceux à qui nous tendons la main pour construire ensemble et de redéfinir la relation qui lie le parlement et le gouvernement. J’ai pu constater à l’Assemblée nationale que les membres des différents partis pouvaient très bien, sur des sujets d’intérêt général comme, par exemple, celui du financement de la dépendance, arriver à des accords en commission parlementaire avant d’être malheureusement rattrapés au moment du vote par de destructrices et stériles logiques partisanes qu’il nous faut aujourd’hui dépasser comme cela a pu être le cas après-guerre dans le cadre du Conseil national de la Résistance.

Quel bilan tirez-vous de votre mandat de députée ? De quelles réalisations personnelles ou collectives êtes-vous la plus fière et heureuse ?

Je me suis d’abord très engagée dans la commission des Affaires étrangères de l’Assemblée nationale dont je suis la secrétaire depuis 2022 – tout particulièrement sur l’Ukraine. Je me suis rendue plusieurs fois à Kiev pour évaluer le soutien de la France à ce pays en guerre sur le plan humanitaire, économique et militaire et pour rencontrer mes homologues du parlement ukrainien dans le but d’examiner comment nous pouvions mieux les aider pour faire face à l’agression qu’ils et leurs compatriotes subissent. Je suis également vice-présidente du groupe d’amitié France-Ukraine et j’ai beaucoup accompagné les réfugiés ukrainiens à Paris pour régler leurs problèmes de logement, d’emploi, de garde et de scolarisation des enfants. Je les suis depuis maintenant deux ans tout le long de leur intégration parfaitement réussie et qui a été saluée par Madame Zelenska, première dame d’Ukraine. Certes nous le leur devons. J’ai également travaillé à renforcer la diplomatie parlementaire en portant plusieurs résolutions concernant notamment la reconnaissance de l’Holodomor (famine créée en Ukraine dans les années 30 par les autorités soviétiques) de même que celle du groupe Wagner comme groupe terroriste, et la résolution poussant à l’utilisation des intérêts des actifs russes gelés en Europe pour la reconstruction de l’Ukraine.

Sur un plan plus national et parisien, je me suis beaucoup démenée sur la question des plateformes de quick commerce (activités commerciales de distribution fondée sur la promesse d’une livraison effectuée dans un délai très court) en pointant à la fois la distorsion de concurrence avec nos commerces traditionnels, les dommages urbanistiques et environnementaux occasionnés par ces activités et également leurs impacts sociaux très négatifs puisqu’elles emploient beaucoup de livreurs sans-papiers et littéralement esclavagisés. Si les dark-stores (micro-entrepôts logistiques de distribution) ont aujourd’hui disparu de Paris, certaines plateformes de distribution continuent de prendre à la gorge les restaurateurs qui travaillent avec elles en ne respectant qu’a minima les normes sociales et environnementales applicables. Je mène ce travail et ce combat conjointement avec le parlement européen qui a commencé à élaborer une directive européenne concernant ces plateformes de distribution. J’ai pu, à titre personnel, présenté un rapport parlementaire sur le sujet qui a été voté à l’unanimité en préparation d’une proposition de loi qui n’a malheureusement pas pu être inscrite à l’ordre du jour de l’assemblée des députés.

En quoi a pu consister votre action pour le 14eme arrondissement de Paris ?

Dans le cadre de mon travail sur les plateformes de distribution, j’ai pu, à leur plus grande satisfaction, débarrasser les Quatorziens de tous les dark stores de la rue Dumoncel, de la place de Catalogne et du boulevard Brune, qui avaient pu être installés sur la base d’une faille juridique du très ancien PLU de la Ville de Paris. Pour ce faire, j’ai travaillé avec Elisabeth Borne et Olivia Grégoire à la prise d’un décret visant à confirmer que ces fameux dark stores étaient des entrepôts logistiques et non des commerces dont ils n’avaient pas à prendre la place. C’est ce décret qui a entrainé leur fermeture, ce dont je me réjouis. J’ai aussi apporté ma contribution sur d’autres sujets locaux avec ma double-casquette de députée et de conseillère de Paris, notamment sur les plans de circulation de la Porte d’Orléans, de l’avenue Jean Moulin et les grands projets d’aménagement concernant Reille, La Rochefoucauld ou bien Saint-Vincent-de-Paul (qui était le grand combat d’Eric Azière). Autant de sujets sur lesquels j’essaie de faire avancer les choses dans le bon sens en m’appliquant à entretenir les meilleures relations de travail avec les élus de la municipalité parisienne dont je reste bien sûr une opposante mais une opposante toujours très résolument constructive.

Cliquez ici pour le lien vers le site de Maud Gatel, députée de Paris.

Avec Nicolas Mansier (suppléant)

La rue de l’Ouest exhale un parfum des années 80

La plaque “Mauvais Sang” de Jean-François Caillarec (photo C. Degoutte)

Les “artivistes du 14ème” ont encore frappé ! Jean-François Caillarec et Claude Degoutte n’ont eu aucun mal à convaincre la très charmante opticienne de Ouest Optic situé au 23 de la rue de l’Ouest du bien-fondé de leur entreprise visant à illustrer la plaque de rue qui orne la façade de sa boutique. Le 23 rue de l’Ouest, qui est un des seuls immeubles de la rue à avoir survécu à la rénovation immobilière des années 70-80, marque en effet le point de départ de la cultissime séquence du film Mauvais sang réalisé par Léos Carax en 1986 où l’on voit Denis Lavant s’élancer dans une course haletante et enfiévrée le long des palissades de chantier de la rue au son de Modern Love, la non moins cultissime chanson de David Bowie.

Tout comme celle du 54 de la rue du Château, la nouvelle plaque de rue illustrée posée par Jean-François Caillarec est agrémentée d’un site internet explicatif réalisé par Claude Degoutte qui donnera aux curieux toutes les informations utiles pour notamment comprendre le contexte de cet hommage cinématographique in situ (cliquer ici).

Photo C. Degoutte

Rappelons également que dans son livre intitulé “Il était une fois dans (la rue de) l’Ouest”, Gérard Brunschwig raconte l’épopée des habitants de Pernety qui, entre 1973 et 1982, se sont mobilisés contre le projet de rénovation immobilière de leur quartier promis à la démolition. Si cet “héroïque combat collectif de résistance” permit de préserver une soixantaine d’immeubles, très nombreuses furent les destructions de bâtiments dont témoignent notamment les photos de Daniel Chenot. Cette séquence du film Mauvais sang réalisé par Léos Carax au milieu des années 80 immortalise les palissades installées le long de la rue de l’Ouest le temps des travaux de rénovation. D’autres oeuvres de street-art, dont notamment Les expulsés d’Ernest Pignon-Ernest réalisée quelques années plus tôt dans la même rue, ont évoqué cette période marquante de l’histoire du Quartier Pernety.

“Les expulsés” d’Ernest Pignon-Ernest (photo C. Degoutte)
Le jour de la pose de la plaque définitive, avec la collab’ de Singular Vintage (photo C. Degoutte)

bad beu sur les traces de la “génération perdue”

bad et ses deux nouveaux carreaux (photo C. Degoutte)

Après Jean-François Caillarec, c’est Stéphane Malherbe, alias bad beu, qui remonte le temps pour mettre l’art urbain à l’heure des Années folles de Montparnasse. Avec la complicité de Claude Degoutte, le grand manitou du street art in situ, il rend hommage à la “génération perdue”, ce mouvement d’écrivains américains qui se sont exilés à Paris au début du siècle dernier après avoir participé à la Première Guerre mondiale. Au printemps 1925, la fameuse première rencontre entre Hemingway et Scott Fitzgerald relatée dans Paris est une fête a lieu au Dingo Bar (aujourd’hui Auberge de Venise) situé au 10 rue Delambre à deux pas du Carrefour Vavin (aujourd’hui place Pablo Picasso). bad beu a réalisé deux carreaux pour immortaliser cet évènement littéraire de tout premier ordre.

Naissance d’une amitié critique et affectueuse

Dans Paris est une fête qui est considéré comme l’un de ses chefs-d’oeuvre, Ernest Hemingway raconte ses jeunes années d’écrivain désargenté à Paris dans les années 1920, les Années folles de Montparnasse. Beaucoup de Britanniques et d’Américains de Paris se donnent rendez-vous au Dingo American Bar and Restaurant tenu par Louis Wilson et sa femme au 10 de la rue Delambre. Un jour de désoeuvrement du printemps 1925, alors qu’il s’inflige la compagnie de “quelques individus totalement dépourvus d’intérêt” (!), Hemingway y rencontre Scott Fitzgerald, l’auteur de Gatsby le magnifique et chef de file de la “lost generation”, qui est celui qui lancera sa carrière d’écrivain. C’est le début de la longue “amitié critique et affectueuse” liant les deux géants de la littérature américaine que l’on se devait bien d’immortaliser in situ cent ans plus tard par le moyen d’une oeuvre de street art. Sur la suggestion de Claude Degoutte, bad beu n’a pas hésité à s’y coller en réalisant pas moins de deux carreaux très colorés – qui attendront toutefois un peu avant d’être collés… Le premier dédié à Hemingway a été acquis par le nouveau propriétaire du restaurant qui lui réservera sans doute une place d’honneur au bar (resté d’origine) en ayant bien à l’esprit que le Prix Nobel de Littérature y inventa certains des nombreux cocktails décrits dans ses romans dont le fameux Long Island Iced Tea. Le second dédié à Scott Fitzgerald s’inscrit dans le projet global intitulé “rue des petits carreaux” porté par les deux complices de l’in situ dont l’objectif est de faire connaître aux Parisiens les endroits où vécurent certaines personnalités marquantes en rebaptisant symboliquement les rues de leur nom. Un carreau “Rue Scott” sera donc collé à l’extérieur du restaurant une fois que la peinture y aura été refaite. Courant été 2024 si tout va bien…

Pose du carreau “Rue Scott” le 10 septembre 2024 (photo C. Degoutte)
Photo C. Degoutte

Cliquez ici pour accéder au site de l’Auberge de Venise.