Patricia Benech Le Roux, “women empowerment activist”

Photo Nath Lee Vall’art

“Hom’Art pour tous !” Tel est le slogan de Garidell14, l’association fondée par Patricia Benech Le Roux, qui exprime bien ce que peut être la générosité bretonne en action. Garidell signifie galerie en breton. Patricia a choisi le 14ème arrondissement où les Bretons restent très implantés comme galerie principale des oeuvres de street art des artistes femmes qu’elle entend avant tout promouvoir. Nous l’avons rencontrée dans le Quartier Pernety où elle réside non sans avoir poussé une pointe jusqu’à la Régie de Quartier Paris 14 où elle exerce ses talents de coordinatrice de projet Lien social et cultures et même jusque dans le 13ème arrondissement à la Cité de Refuge de l’Armée du Salut où elle a également essaimé.

Faiseuse de liens à la Régie de Quartier Paris 14

C’est vraiment un très bel endroit que la Régie de Quartier Paris 14. Les portes et fenêtres peintes de toutes les couleurs de la rue Prévost Paradol sont un îlot de fraîcheur bienvenu dans le Quartier de la Porte de Vanves qui est un quartier prioritaire de la politique de la ville. C’est à cet endroit que Patricia Benech Le Roux a choisi de retourner “travailler sur le terrain” après avoir exercé pendant presque vingt ans des fonctions de chercheuse en sociologie au CNRS. La Bretonne de Trévou-Tréguignec va commencer par y être coordonnatrice de l’Accorderie Paris Sud pour conduire ce dispositif de solidarité vers l’autonomie associative et financière. L’Accorderie est l’expression d’un concept québécois qui organise des échanges de services rémunérés en temps pour lutter contre la pauvreté et l’isolement. Patricia en connait bien le fonctionnement puisqu’elle y a effectué dès 2015 un stage de quinze jours pour valider son Certificat de Formation à la Gestion Associative à la suite duquel elle est elle-même devenue accordeuse (*). “Ce qui m’a tout particulièrement plu dans ce dispositif c’est qu’il permet de développer le pouvoir d’agir des individus et des collectifs, se rappelle-t-elle. Je me retrouvais complètement politiquement et idéologiquement dans cette notion d’empowerment”. Patricia approfondit ensuite sa connaissance du travail associatif en devenant responsable de projet Lien social et cultures de la Régie de Quartier Paris 14. Comme celui de toutes les régies de quartier, l’objectif de la structure basée Porte de Vanves est double : insérer par l’activité économique et assurer le lien social avec les habitants du quartier alentour. C’est dans ce dernier registre que Patricia va tout particulièrement s’illustrer en animant le Collectif Paradol (cliquez ici) qui organise des fêtes de quartier dans le large espace piétonnier coloré de la rue Prevost Paradol. Ce groupe informel, qui se réunit une fois par mois pour un échange d’idées, rassemble actuellement une quinzaine d’associations ainsi que les bailleurs sociaux qui sont propriétaires de la quasi-totalité des murs du quartier. Les fêtes de quartier qu’il prépare sont au nombre de quatre par an : Faîtes de la soupe en mars, Paradol Plage en juillet, De l’Art à Paradol en octobre et Lumières sur Paradol en décembre. Patricia prend également part à l’animation du Café culturel Paradol (cliquez ici) en y organisant tous les mois des expositions d’artistes locaux et d’ailleurs. En plus d’instiller de la culture dans la vie du quartier dont elle a la charge de développer le lien social, la coordonnatrice de projets milite activement pour l’embauche de femmes au sein des quatre pôles de la régie dédiés à l’insertion professionnelle des habitants. “Il me tient très à coeur de favoriser le travail des femmes en insertion vu les conditions de vie très difficiles qui sont les leurs : hébergement dans des centres d’accueil, enfants en bas âge ou restés au pays, etc. Or le travail tel qu’il est pensé ne favorise bien sûr pas du tout leur insertion professionnelle. S’il ne tenait qu’à moi, nous embaucherions 100% de femmes à la Régie de Quartier Paris 14”.

Les portes et fenêtres colorées de la Régie de Quartier Paris 14

Fresques participatives 100% féminin

En parallèle de son activité salariée à la régie de quartier, Patricia développe au sein de Garidell14, l’association qu’elle a fondée en 2015, des activités bénévoles qui visent également à favoriser l’emporwerment des femmes. Au départ, Garidell14 se donnait pour objectifs généraux de favoriser l’accès à l’art et de promouvoir l’art urbain, qui est peut-être le plus accessible et le plus libre d’entre les arts, en vue de favoriser la mixité sociale et culturelle. “J’ai été complètement renversée par l’esthétique et l’invention de certains street artists, se souvient l’ex-chercheuse en sociologie. L’exposition de 2013 de Keith Haring au Centre Pompidou ainsi que celle intitulée “Le pressionisme” qui s’est tenue la même année à la Pinacothèque et qui raconte l’histoire du street art à New York (avec des artistes comme Lady Pink, Basquiat ou Rammellzee) ont été de véritables chocs et les déclics de ma passion pour l’art urbain. J’ai également été très impressionnée par les pochoirs de Kristx que j’ai pu admirer au milieu de graffs et de fresques de toutes sortes en me rendant à Ivry-sur-Seine. On peut vraiment être scotché par les oeuvres de certains artistes urbains en arpentant les rues d’une ville”. Sa sensibilité féministe affirmée va l’amener à tout particulièrement s’intéresser aux street artists femmes. Elle commence par mettre en place des expositions qui en promeuvent les oeuvres à la Maison des Associations du 14ème, puis dans différents autres lieux qui réunissent jusqu’à 25 artistes et plus. La première fresque participative 100% féminin qu’elle organise va redonner vie à un mur du Collège François Villon à la Porte de Vanves en 2017. Mais le plus beau projet qu’elle a réalisé à ce jour est sans doute celui de la Cité de Refuge qui dépend de l’Armée du Salut et qui est abritée par un immeuble conçu par Lecorbusier situé dans le 13ème arrondissement de Paris. Christophe Piedra, le directeur du centre d’hébergement, se félicite que Patricia soit venue mettre de la vie dans ce lieu ouvert aux arts et à la culture : “L’idée de départ était de faire une exposition éphémère, se souvient-il. Mais sentant le fort potentiel de ce que Patricia pouvait nous apporter, je lui ai proposé de s’occuper également des murs de la Cité avec le concours des personnes accueillies qui se chargeraient de choisir les oeuvres des street-artists femmes et même de participer à leur création. Le fait d’avoir orné les murs de graffs de qualité a complètement changé l’atmosphère de la Cité des Dames qui est le dispositif que nous avons créé pour accueillir les femmes en précarité”. C’est à nouveau le mur du collège François Villon dans le 14ème arrondissement qui aura les honneurs du prochain projet porté par Patricia en accueillant une nouvelle fresque participative 100% féminin qui sera réalisée en juin 2022 à partir des choix effectués par un jury d’habitants composé d’élèves de Villon, de locataires RIVP et de jeunes du Centre Socioculturel Maurice Noguès qui se verront proposer sur Instagram différentes oeuvres réalisées par des artistes femmes. Sans nul doute une nouvelle façon de surprendre et d’interpeler les habitants et passants de la Porte de Vanves en produisant d’éphémères mais authentiques oeuvres d’art. “Celui qui ne voit rien d’étrange n’a jamais regardé un homard en face” (Auguste, comte de Villiers de l’Isle-Adam).

Graff “en construction” de Kaldea à la Cité de Refuge (2019)

(*) Patricia est aujourd’hui membre du conseil d’administration et vice-présidente de l’Accorderie Paris Sud.

Cliquez ici pour accéder à la page Facebook de Garidell14 et ici pour accéder au compte Instagram de Garidell14

3 thoughts on “Patricia Benech Le Roux, “women empowerment activist””

  1. Bel article ! Patricia le mérite bien, et même davantage tant son engagement social, artistique et “féministe” est riche et généreux, sans compter les couleurs et les sourires qu’elle fait fleurir dans les quartiers qui grâce à son travail associatif et culturel ne seront plus jamais des quartiers ordinaires.
    Il faudrait inventer un nouvel Prix Nobel pour honorer ces oeuvres de démocratie participative. Elle serait la première, j’en suis sûr. Bravo Patricia ! Ça me donne envie d’aller te voir et d’admirer tout ce que tu fais dans le 14 ème.

  2. Très intéressant, cet article qui me permet de mieux te connaître, Patricia et révèle tes engagements variés auxquels j’adhère totalement ! Surtout, reste auprès de nous, habitants du QPV, nous avons besoin de ton dynamisme, de ton pep’s

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