Balade street-art à Paris 14 : art urbain et mémoire des lieux

Double anamorphose en hommage à Coluche et sa femme Véronique par Zag et Sia

“Les lieux se souviennent des évènements”, notait James Joyce dans son roman Ulysse. Cette réflexion, qui n’est pas tombée dans l’oreille d’un sourd mais dans celle du Quatorzien Claude Degoutte, figure en exergue de son très beau livre intitulé Paris Street Art, la mémoire des lieux. Le “fotograff” y revisite le concept des oeuvres d’art in situ qui sont celles réalisées et produites pour un endroit spécifique en entrant en résonnance avec son histoire, sa mythologie ou son actualité. Claude a bien voulu décliner ce concept localement en nous offrant une balade street art in situ dans le 14ème arrondissement.

De Coluche à Miller, l’extraordinaire substrat artistique du 14ème

A tout seigneur tout honneur, notre balade s’ouvre, aux confins du 13ème arrondissement, par l’hommage à Coluche situé entre la rue Gazan où il résidait et la rue de l’Amiral Mouchez : le génial humoriste et sa femme Véronique y sont réunis dans une double anamorphose réalisée par Zag et Sia sur l’escalier d’une trentaine de marches de la rue Lemaignan. Un peu plus loin, nous traversons le parc Montsouris où fut tourné Cléo de 5 à 7, le célèbre film d’Agnès Varda qui habitait la rue Daguerre à deux pas de laquelle a été réalisée en son honneur une fresque poétique de 25 m. “On réfléchit à immortaliser le film par une plaque ou un pochoir sur une boite métallique du parc”, nous dit Claude. Sortis avenue René Coty, nous sommes soudain confrontés à une oeuvre de street art très originale signée Léonalix Maz représentant une vue aérienne du quartier Montsouris chargée en Lubrizo, principe actif perturbateur des lignes cartographiques. Remontant l’un des escaliers de l’avenue, nous traversons la rue des artistes et tombons rue de l’Aude sur une grande fresque réalisée sur le mur d’un bâtiment Emmaüs par Twopy, qui a fait des rats les principaux personnages de ses oeuvres après avoir séjourné aux Grands Voisins dans un atelier d’artiste qui était un ancien laboratoire où étaient étudiés nos amis “surmulots”. Poussant jusqu’à la villa Seurat, haut lieu artistique du 14ème et autrefois conçue comme une véritable cité d’artistes regroupant de nombreuses maisons ateliers, Claude évoque le souvenir d’une scène des Tontons flingueurs avec Lino Ventura qui pourrait elle aussi être immortalisée par une plaque. Le numéro 18 de la voie qui hébergea Henri Miller, l’auteur de Tropique du Cancer, mais également Chaïm Soutine et Antonin Artaud, marque très précisément le début de la démarche du fotograff se lançant dans le projet d’écrire un livre sur les oeuvres in situ : “J’ai proposé à David Singular Vintage qui avait réalisé un pochoir d’Arthur Miller, qu’il avait collé à Belleville où l’écrivain n’avait pas du tout ses habitudes, de venir le poser à l’endroit où Miller habitait. C’est le concept même de l’in situ que de donner un surcroit de sens aux oeuvres produites. L’idée a beaucoup plu à David qui l’a réutilisée pour Albert Camus dont il a posé un pochoir à l’hôtel du Poirier rue Ravignan où il a terminé d’écrire L’étranger ainsi que rue Réaumur où il travaillait pour Combat et au Théâtre Antoine où fut créée par lui la pièce Les Possédés adaptée du roman de Dostoïevski”

Pochoir d’Henry Miller par Singular Vintage posé en face du 18 Villa Seurat (Photo C. Degoutte)

Endroits mythiques de l’histoire de l’art

Les oeuvres de street art sont par trop disséminées dans notre arrondissement pour que l’on puisse organiser un véritable circuit de leur découverte comme, par exemple, à la Butte aux Cailles dans le 13ème arrondissement. Après avoir marché un moment, nous nous engageons dans la Petite Ceinture au niveau de la gare du Poinçon. La portion de 750 m de voie ferrée reste un repère important pour les graffeurs de l’arrondissement et réserve de jolies surprises tout le long de ses voies surélevées végétales. Arrivés rue Didot, nous nous arrêtons devant la fresque de Fred Calmets qui rend hommage au grand peintre chinois Zao Wou-Ki. “A son arrivée à Paris, Zao Wou-Ki installa son premier atelier rue du Moulin Vert, tout proche de celui de Giacometi, m’explique Claude. Puis il emménagea rue Jonquoy, tout près de la rue Didot où Fred Calmets a réalisé cette fresque de 4 m sur 9 m à l’initiative des habitants du quartier qui croisaient souvent le peintre dans la rue, sa blouse tachée de peinture et ses vielles baskets aux pieds”. Au niveau de la rue d’Alésia, nous nous arrêtons à l’endroit précis où Cartier-Bresson a pris en 1961 l’une de ses photos les plus célèbres montrant Giacometti traversant la rue sous la pluie, le col du manteau relevé sur la tête. C’est à cet endroit mythique que Jérôme Gulon a collé une mosaïque représentant un portrait d’Alberto Giacometti et assortie d’un clin d’oeil à cette fameuse photo.

La mosaïque de Jérôme Gulon malheureusement disparue (photo de 2011). La référence précise à la photo de Cartier Bresson est toute discrète, en bas à gauche, mais elle y est ! (Photo J. Gulon)

Plaques commémoratives et boîtes à musique

Le 54 de la rue du Château est un autre de ces endroits mythiques en ce qu’il fut il y a tout juste un siècle le rendez-vous de nombreux Surréalistes dont notamment Breton, Prévert et Tanguy. La plaque provisoire collée par les soins de Jean-François Caillarec a tenu deux semaines avant qu’elle ne soit décollée par un indélicat. L’avenir nous dira si ce beau projet de commémoration aura une suite grâce au concours de la Mairie du 14ème. Mais nous nous dirigeons pour l’heure vers l’impasse Florimont dont tous les Quatorziens ont au moins entendu parler parce qu’elle fut pendant plus de vingt ans le lieu de la résidence de Georges Brassens qui est peut-être la plus grande gloire de l’arrondissement. A son entrée, une immense photo de l’artiste déambulant dans l’impasse est sans doute le travail le plus intéressant réalisé par la Mairie du 14ème à l’initiative du Conseil de Quartier Pernety. A l’intérieur de l’impasse, plusieurs plaques commémoratives ont déjà été posées en l’honneur du géant de la chanson française, mais également une boîte à musique Brassens interprétant la chanson Les amoureux des bancs publics. Cette oeuvre originale in situ est celle de The Atomik Nation, deux musiciens qui réalisent pour le street-art des séries de boîtes à musique rendant hommage aux plus grands noms de la chanson française (Brassens, Gainsbourg, Piaf, etc.).

Pose de la boîte à musique Brassens, impasse Florimont.

Le 14ème, berceau de l’art urbain

Après être passés devant l’atelier de Giacometti qui fait l’angle des rues du Moulin Vert et Hyppolite Maindron, nous nous dirigeons pour terminer notre balade vers la rue des Thermopyles dont très peu savent qu’elle a été le berceau français de l’art urbain. “Bien avant la création du square Alberto Giacometti, cet endroit était une sorte de hangar tombé en ruines, nous précise Claude. La légende veut que c’est sur l’un de ses murs qu’a démarré l’art urbain en France en 1981 car c’est à cet endroit précis que le Quatorzien Blake le Rat a posé ses premiers pochoirs dont son livre témoigne. Un exemple bientôt suivi par d’autres, comme Jef Aérosol ou bien encore Miss. Tic”. Nous voici arrivés au terme de notre promenade street-art que nous vous invitons vous aussi à faire en vous laissant guider par le très beau livre de Claude Degoutte qui contient vingt pages sur le 14ème arrondissement et qui sortira en septembre 2023 dans toutes les bonnes librairies (déjà disponible sur le site de la FNAC).

Vient de sortir ! Le livre de Claude Degoutte : “Paris Street Art, la mémoire des lieux”. Cliquer ici pour un avant goût documenté avec des extraits, une bibliographie et 100 photos qui ne sont pas dans le livre.

Le Paris plus beau de Jean-François Caillarec

Jean-François posant la plaque du 54 rue du Château (photo C. Degoutte)

Il est de ceux qui transforment le plomb en or et qui veulent rendre la vie plus belle. Jean-François Caillarec, qui a déjà une centaine d’idées de plaques de rue à son actif, a sauté sur l’occasion qui s’offrait à lui de rendre hommage à une adresse mythique de l’histoire de l’art, le 54 de la rue du Château, pour exprimer tout son talent d’artiste urbain. Nous l’avons rencontré sur les lieux de sa dernière oeuvre et l’avons interrogé sur son parcours et ses projets artistiques.

Transformer le mobilier urbain en oeuvres d’art

Rien ne prédestinait Jean-François Caillarec, Breton de Paris depuis vingt-cinq ans, à devenir “décorateur d’extérieur”. Ce physicien de formation, qui travaille aujourd’hui dans le secteur médical, a certes toujours été traversé par quelques velléités artistiques. Mais à peine plus que tous ceux qui envisagent la vie de façon un peu plus créative que la préparation du prochain week-end. Le Quatorzien commence à peindre des tableaux sur le thème de Paris, particulièrement du métro parisien. Puis, il prend l’habitude de participer à Arts en balade, une manifestation de créateurs qui a lieu chaque année à la fin juin sur la Coulée Verte René Dumont dans le 12ème arrondissement de Paris. Encouragé par les organisateurs à tirer au maximum partie de l’espace naturel et verdoyant, Jean-François choisit en 2019 de réaliser une maquette de banc de jardin public peinte aux couleurs de l’arc-en-ciel qui rencontre un tel succès qu’elle fait partie des projets retenus puis votés dans le cadre du budget participatif de la Ville de Paris. “Cette réalisation m’a motivé pour la suite car nombreux sont ceux qui rêvent de créer des oeuvres dans l’espace public”, nous confie celui qui n’est devenu que sur le tard artiste urbain. Elle va de fait être le déclic et le point de départ de la réalisation d’autres “installations dans la rue” qui utilisent toutes sortes de mobilier urbain pour les transformer en oeuvres d’art. “Je fais néanmoins toujours en sorte d’utiliser du plastique et du carton pour que les services de la Ville de Paris puissent en faire ce qu’ils veulent”, tient à nous préciser notre gentil vandale. Et je signe systématiquement mes installations provisoires avec mon adresse Instagram pour permettre mon identification si nécessaire. Car j’assume absolument tous les risques liés à la production de mes oeuvres. Qu’est-ce qu’être artiste sinon accepter de prendre des risques ?”

Entouré pour la première fois d’un public fasciné… (Photo C. Degoutte)

Une centaine de plaques provisoires et trente (moins trois) plaques pérennes

Le confinement lié à la pandémie va stimuler la créativité de Jean-François. L’idée lui vient d’illustrer les plaques de rues parisiennes. “J’ai commencé à préparer mes plaques pendant le confinement et à les poser dès sa levée au mois de mai 2020, se rappelle le street-artist. Jean-François fait bien le distingo entre plaques “provisoires” et plaques “pérennes”. Les premières, dont il a produit une bonne centaine d’exemplaires, sont facilement décollables et sont de fait souvent enlevées pour finir par se retrouver dans le salon des amateurs. Elles consistent en des photos imprimées sur carton ou plastique qui sont ensuite collées sur les plaques de rue grâce à quatre points adhésifs. Les plaques pérennes sont quant à elles imprimées sur dibond et encollées fortement sur les plaques de rue originelles, de sorte qu’on ne peut en principe les retirer qu’au burin. “Toutes mes plaques provisoires ont vocation a devenir des plaques pérennes que je réalise pour qu’elles restent collées des dizaines d’années, assume Jean-François. J’en ai déjà posé une trentaine dont trois ont malgré tout été enlevées par les services de la Ville de Paris. Peut-être la difficulté rencontrée pour les enlever explique-t-elle en partie leur longévité.” De fait, ce sont les agents de la ville eux-mêmes qui aujourd’hui nettoient les plaques pérennes qu’il a posées et qu’il a pris soin de couvrir d’un vernis pour permettre leur entretien. C’est à coup sûr la reconnaissance inofficielle de projets qui n’ont pas tous loin de là fait l’objet des autorisations municipales ou administratives nécessaires, ce qui est tout à fait compréhensible au regard des délais d’obtention de ces autorisations. Si Jean-François a, par exemple, obtenu en 2021 l’accord de la Mairie du 12ème arrondissement par l’intermédiaire de sa Commission culturelle pour apposer trois plaques de rues rue Baudelaire à l’occasion du bicentenaire de la naissance du poète, jamais il n’a pu recevoir en temps et en heure l’aval de la Direction des Affaires Culturelles sur son projet. Ce qui s’appelle être complètement à côté de la plaque…

Montage photo C. Degoutte

Vulgarisateur de culture

Mais Jean-François n’entend pas désarmer et continue son combat pour l’embellissement de la capitale au sein du collectif ou en solo. Même s’il a finalement été recalé en 2022 au budget participatif de la Ville de Paris pour le projet qu’il portait (et qui fut un premier temps retenu) visant à l’apposition de plaques à la mémoire d’un autre illustre poète français rue Ronsard dans le 18ème arrondissement de Paris, notre indécrottable poseur de plaques continue à foisonner d’idées. D’où lui viennent-elles ? Ce sont souvent ses lubies personnelles qui lui font s’intéresser tantôt aux poètes tantôt aux peintres célèbres. Mais Jean-François est également soucieux de faire oeuvre utile : “Enormément de personnes ne savent pas qui est Delacroix ou même Michel-Ange, témoigne-t-il. C’est pourquoi j’ai été si heureux d’illustrer leur plaque de rue parisienne respective avec La Liberté en Marche et La Création du Monde. J’ai, autre exemple, illustré la rue de l’Observatoire avec la Voie Lactée. Parfois une photo parle beaucoup plus qu’un nom, et mes oeuvres permettent de facilement associer l’une à l’autre“. Claude Degoutte, qui est un autre fidèle arpenteur des rues parisiennes, lui fournit aujourd’hui de nombreuses autres idées de plaques illustrées en continuant à développer le concept des oeuvres in situ qui sont réalisées et produites pour un endroit spécifique en entrant en résonnance avec le lieu choisi, son histoire, sa mythologie ou son actualité. La première plaque de rue in situ réalisée par Jean-François est celle réalisée rue Valette qui évoque le célèbre film La Boum de Claude Pinoteau parce que Vic, l’héroïne du film interprétée par Sophie Marceau, habite au “6ème étage gauche” (sic) du 21 rue Valette qui ne compte en réalité que trois étages… Et c’est donc aujourd’hui le 54 de la rue du Château, une adresse mythique de l’histoire de l’art en ce qu’elle fut il y a un siècle le lieu de rencontres de nombreux Surréalistes dont notamment Breton, Prévert et Tanguy, que l’artiste urbain honore d’une nouvelle plaque de rue in situ. Si Jean-François a bien conscience que transformer la ville et contribuer à l’embellir se fait extrêmement lentement, il tient absolument à être de ceux qui y contribuent. “Faire partie de ce mouvement, même à une petite échelle, je trouve ça super bien”, nous dit-il. Pour que Paris chargée de vie et d’histoire reste à jamais la plus belle ville du Monde…

La plaque provisoire du 54 rue du Château (photo C. Degoutte)

Art-délinquance à Pernety : Que fait la police ?

Scandaleux ! (Photo C. Degoutte)

Samedi dernier 24 juin a marqué une nouvelle journée noire pour le Quartier Pernety dont nombre d’habitants se désolent de constater la dégradation continue de la qualité de vie. A son point excentré du 56 de la rue du Château qui est limitrophe du 15ème arrondissement de Paris, des vandales ont saccagé le somptueux mobilier urbain dont les services de la voirie parent nos rues. Pernety 14 a mené l’enquête.

Activistes “surréalistes” amateurs de “cadavres exquis”

Arrivé sur les lieux du forfait, notre envoyé spécial n’a pu que constater les dégâts : sur l’aile droite de l’ensemble immobilier du 23 place de Catalogne qui va du 10 rue Alain au 56 rue du Château, la très surréaliste plaque de rue indiquant la fin de la rue du château a été affublée d’une photo représentant quatre hurluberlus sévissant dans le Quartier il y a aujourd’hui un siècle : un certain Jacques Prévert, sa femme Simone et son frère Pierre entourent André Breton, ancien gourou d’une secte dite “surréaliste”. Autant dire des poètes… Une recherche sur internet (cliquez ici) nous apprend que ces zozos vivaient il y a cent ans avec leurs compagnes au 54 de la rue du Château qui était à l’origine “une toute petite bicoque de marchands de peau de lapin” transformée en une luxueuse maison par Marcel Duhamel, éditeur et futur créateur de La Série Noire. Dans Hebdromadaires (1972), le susnommé Jacques Prévert se souvient : “Breton disait de la rue du Château qu’il n’avait pas vu pareille atmosphère de liberté… Il y avait un peintre, Yves Tanguy qui n’avait jamais peint, un mécène, Marcel Duhamel, qui était alors directeur d’hôtel, et moi qui ne foutais rien.” On y trouvait “le véritable alambic de l’humour au sens surréaliste”, surenchérit le dit Breton dans ses Entretiens. De fait, le 54 de la rue du Château, qui est aujourd’hui un petit parking situé au-dessus des voies de la gare Montparnasse, était il y a un siècle “un atelier, un phalanstère, une maison ouverte à tous vents, aux artistes et aux chats”. Outre Breton et Prévert, Giacometti, Desnos, Queneau y passaient. Benjamin Peret, puis Aragon y vécurent. Beaucoup de réunions surréalistes s’y tinrent et c’est là que Prévert aurait donné au jeu des petits papiers le nom de “cadavre exquis”. Nous sursautons aux mots de “cadavres exquis”. Comment un cadavre pourrait-il être exquis ? Pourquoi diantre des activistes surréalistes auraient-ils voulu rendre hommage à des nécrophages ? Sans doute vaut-il mieux appeler la police… Oui, le recours à la maréchaussée est de toute force nécessaire. Car vraiment, quels exemples pour nos enfants que ces poètes bons à rien ? Imagine-t-on encore aujourd’hui nos chères petites têtes blondes réciter du Prévert quand elles ont bien mieux à faire avec leurs jeux vidéos ou leurs poupées LOL ? Fort heureusement, la plaque “provisoire” sauvagement apposée sur celle du 56 de la rue du Château pourra facilement être ôtée par les services de la municipalité. Nous rappelons quand même à ces vandales, surréalistes en peau de lapin, que la dégradation des mobiliers urbains est punissable de plusieurs sanctions. Dans le cas de dommages légers, le responsable du délit se doit de payer une amende de 5e classe et est passible d’une peine de travail d’intérêt commun. Dans le cas de dommage plus grave comme la destruction de biens immobiliers ou des tags, le fautif encourt une peine pouvant aller jusqu’à deux ans d’emprisonnement avec une amende de 30 000 euros. Cette sanction peut aller jusqu’à 75 000 euros d’amende et cinq ans de prison.

Une photo de la victime avant sa sauvage agression (Photo YB)

Dominique Massot : “On peut très vite se retrouver à la rue”

Dominique Massot en compagnie de Freddy Prudentos, Chef à La Mie de Pain (photo Colette Desage).

Il est membre du conseil d’administration et responsable des collectes alimentaires des Oeuvres de La Mie de Pain, l’association spécialisée dans l’aide d’urgence et la réinsertion sociale et professionnelle des personnes en difficultés. Le Quatorzien Dominique Massot nous a reçu dans son appartement de la rue Didot pour nous entretenir de son combat contre la précarité et l’exclusion au sein de sa structure caritative d’élection.

135 ans d’existence et des collectes alimentaires toujours en hausse

C’est au Lions Club que Dominique Massot s’est entiché de La Mie de Pain. L’ancien directeur commercial dont le leimotiv est la lutte contre la faim admet avoir craqué quand il a découvert la “population de misère” dont s’occupe l’organisation fondée il y a 135 ans dans le 13ème arrondissement de Paris par Paulin Enfert, un philanthrope catholique et personnage légendaire qui était également prestidigitateur à ses heures perdues. Le site internet de l’association (cliquer ici) retrace l’histoire de La Mie de Pain des origines du patronage Saint-Joseph de la Maison Blanche à nos jours. “De l’urgence à l’insertion”, tel est le slogan et également le programme de la structure caritative dont les activités sont centrées sur l’accueil (inconditionnel, anonyme et gratuit) et la mise à l’abri d’urgence des personnes les plus vulnérables, celles qui se trouvent exclues de la société. Ses missions et ses actions vont de l’aide alimentaire à l’insertion sociale et professionnelle en passant par l’hébergement d’urgence, le logement accompagné et en résidence sociale. Dominique s’occupe à titre bénévole tout particulièrement des collectes alimentaires depuis déjà une bonne douzaine d’années. Pour cet ancien spécialiste de la logistique qui a été pendant trente ans chargé d’organiser des transports terrestres, maritimes et aériens dans le monde entier, La Mie de Pain, c’est du gâteau ! Il n’en est pas moins très fier de son bilan : “Je me suis aperçu qu’au bout de dix ans j’avais collecté avec mon équipe l’équivalent de près de 350.000 repas, ce qui correspond à l’ensemble des repas que nous distribuons chaque année. Ca, c’est un chiffre qui me parle ! Et ce chiffre est en augmentation constante malgré les évènements de ces dernières années. Encore 35 tonnes en 2021, ce qui est un très bon résultat”, se félicite-il. L’essentiel de son travail consiste à trouver des bénévoles pour les collectes organisées dans la quinzaine de magasins dont il a la charge. “La bande à Massot” regroupe toutes celles et tous ceux qui recueillent les denrées dans les magasins ou bien les trient par catégories une fois acheminées par camion ou camionnette au siège de La Mie de Pain dans le 13ème arrondissement de Paris. Ce sont des copains dont il est allé tirer la sonnette et qui ont eux-mêmes dirigé vers lui d’autres personnes désireuses d’aider. “Tout se fait par le moyen du bouche à oreille et ça fait boule de neige car ceux qui sont venus une fois se prennent au jeu, témoigne Dominique. J’ai aujourd’hui 500 personnes qui sont inscrites sur la liste des volontaires de La Mie de Pain et que je peux contacter au moment d’organiser mes collectes. Cette liste regroupe toutes sortes de gens et des gens de plus en plus de jeunes, ce que je trouve personnellement très encourageant”.

Une structure diversifiée pour répondre à un éternel besoin de solidarité

La Mie de Pain s’est considérablement développée et a considérablement évolué depuis sa création il y a plus de cent ans, tout en restant fidèle aux préoccupations et aux valeurs de son fondateur Paulin Enfert : solidarité, non-discrimination, respect de la personne et engagement sur la durée. Sept structures situées dans différents arrondissements de Paris (principalement dans le 13ème, mais également dans le 15ème et le 5ème) répondent aujourd’hui aux besoins des personnes en situation d’exclusion : le Foyer de Jeunes Travailleurs, les Chantiers d’Insertion, l’Arche d’Avenirs, le Refuge, le Relais Social, le foyer pour femmes sans abri et la Villa de l’Aube. Toutes répondent à leur manière aux impératifs d’aide d’urgence et d’insertion des laissés pour compte de la société, et tout le monde quel que soit son âge est en réalité concerné. “Ca peut aller très vite la chute dans la rue, témoigne Dominique. Prenez l’exemple d’un couple avec enfants bien inséré. Quand le chef de famille perd son travail et donc ses revenus et que le loyer ne peut plus être payé, son couple éclate, il se fait virer de son logement et se retrouve quelques semaines plus tard sur le trottoir avec sa valise. Ca va très très vite, et nous accueillons régulièrement à La Mie de Pain des cadres qui ont tout perdu du jour au lendemain.” Le degré de civilisation d’une société se mesure à sa capacité à remettre sur pied ceux qui, à un moment donné de leur vie, pour de bonnes ou de mauvaises raisons, ont perdu l’équilibre. Et le personnel de La Mie de Pain travaille activement à faire évoluer le regard de la société sur les personnes exclues trop souvent victimes d’ostracisme. Celles qui sont actuellement aidées par l’association ont cinquante-trois ans de moyenne d’âge et peuvent être originaires de tous les pays (plus de quarante nationalités sont représentées). “Cela pourrait être vous ou moi, insiste Dominique. Les personnes migrantes venant de zones de conflits (les afghans, les syriens, les ukrainiens) sont-elles véritablement responsables de leur sort ? Notre accueil est de toute façon inconditionnel, c’est-à-dire sans distinction d’origine ou de confession, en plus d’être anonyme et gratuit. Nous remplissons en réalité le rôle de l’Etat qui nous subventionne quand même pour une bonne part”. Pour, vous aussi, aider La Mie de Pain à boucler son budget annuel de plusieurs millions d’euros, différents moyens sont à votre disposition : le don par courrier, le don en ligne, le soutien régulier par prélèvement automatique, le bénévolat (écrire à benevoles@miedepain.asso.fr) ou bien le legs. Les dons que vous adressez aux Oeuvres de la Mie de Pain sont déductibles à 75% de l’impôt sur le revenu en deçà d’un plafond qui évolue chaque année (à 66% au-delà de ce plafond).

Cliquer ici pour accéder au site de La Mie de Pain.

Le résultat d’une collecte à La Mie de Pain (photo Colette Desage).
Hall d’entrée du centre d’hébergement et d’insertion de la Mie de Pain (photo Colette Desage)

Marie Laure Fadier (*), un talent en trois dimensions

Marie Laure dans son atelier de la rue de l’Eure

Marie Laure Fadier est une artiste peintre résolument moderne et avant-gardiste. Rien ne lui fait vraiment froid aux yeux. Il y a quinze ans, après avoir tout perdu, elle décide de tout changer : de vie comme de sexe ! Elle travaille aujourd’hui à mettre en scène l’ensemble de son œuvre dans une recherche graphique en 3D qui n’exigera pas moins de deux ans de préparation. Nous l’avons rencontrée dans son atelier du Quartier Pernety dans le 14ème arrondissement de Paris où elle a élu domicile depuis plus de 40 ans.

Une vocation et un destin : les fabuleuses rencontres de Marie Laure Fadier

Marie Laure ne s’est jamais vraiment posé de questions sur sa vocation. Pour elle, peindre est une évidente nécessité. Elle commence par suivre les pas de son père architecte en s’inscrivant à l’école d’architecture où elle étudie l’histoire de l’art. Sortie de l’école à 23 ans où elle obtient son diplôme sur toile (une première déjà !), elle profite des dernières belles années de Montparnasse dans l’atelier familial de Notre Dame des Champs qui fait face à Seneliers, le célèbre magasin de dessin qui vend le matériel pour artistes. Elle va tous les matins prendre son petit déjeuner à “La Coupole” où elle croise Sartre et Ionesco. Déjà hantée par des questionnements personnels sur sa véritable identité sexuelle, elle cède pourtant aux conservatismes de l’époque et décide de se marier. Marie Laure raconte plus facilement sa vie que les différentes périodes qui ont jalonné son évolution artistique. Elle est notamment intarissable sur les circonstances extraordinaires dans lesquelles elle a pu bénéficier de l’aide inattendue de personnalités du cinéma, du théâtre et de la politique pour dénicher ses différents ateliers. C’est en effet suite à une histoire rocambolesque que Jean-Pierre Léaud, une connaissance de l’époque, la guidera vers Jean Le Poulain qui lui proposera d’occuper un loft dans le 19ème arrondissement de Paris. Pour obtenir son atelier actuel, elle bénéficiera au hasard d’une rencontre dans un bouiboui chinois du 14ème de l’aide d’un autre protecteur des artistes, Yves Lancien, alors député-maire de l’arrondissement, qui considérait à juste titre que les artistes peintres en étaient l’âme et le patrimoine humain. “De la 3D sans informatique”

Des rencontres, Marie Laure en fait également beaucoup dans le cadre de son travail d’artiste. Son ambitieux projet défini il y a vingt ans, faire de la 3D sans informatique, l’amène à frapper à la porte du plus grand spécialiste français des nouvelles images, le Pr Niño de l’Ecole Normale Supérieure. “On peut le faire mais c’est très compliqué !” , la prévient-il. Il en faut beaucoup plus pour décourager Marie Laure. Pour lui permettre de continuer sa quête, le Pr Niño la met en relation avec Jean-François Colonna, mathématicien à l’école polytechnique dont un des aspects du travail de recherche consiste à mettre en image les équations de la physique mathématique. Marie Laure connaît bien l’école polytechnique car elle y a déjà organisé plusieurs années auparavant une rétrospective de 150 tableaux. Lorsqu’elle rencontre Colonna, elle est frappée par les similitudes existant entre les résultats de son travail obtenu par l’informatique et le sien propre. Elle convainc le directeur des sciences de l’UNESCO de monter une exposition commune, “Les journées mondiales de la science” qui ont lieu en 2004 autour de physiciens, d’astrophysiciens et de chercheurs de tout premier plan dont Hubert Reeves et Michel Cassé. Mais elle ne s’arrête pas en si bon chemin faute d’avoir trouvé de véritable réponse à son obsession : faire de la 3D sans informatique. Elle se plonge pendant un an et demi dans l’étude des techniques développées par les studios Disney pour créer des images en trois dimensions. Elle décortique les images créées par ordinateur et perce les mystères des autostéréogrammes et de l’anaglyphe (technique par laquelle on éprouve la sensation du relief en chaussant des lunettes de couleur). La démarche toute personnelle entreprise par Marie Laure, le regard parallèle qu’elle développe, vont jusqu’à susciter l’intérêt d’ophtalmologues de l’hôpital militaire du Val de Grâce qui, d’abord incrédules, sont tout à la fois convaincus et stupéfaits par la démonstration qu’elle réalise devant eux à l’atelier. « Vous avez exercé votre nerf optique et vos yeux comme un sportif de haut niveau entraine ses mollets », lui déclarent-ils estomaqués. Nouvelles orientations

Mais patatras ! Le monde s’effondre en 2008 non pas tant à cause de la crise financière que parce sa femme la quitte en emportant meubles et tableaux. Le divorce et la remise en question qui s’ensuit l’amènent à changer de vie et à prendre tous les risques. Marie Laure passe quelques années sans toucher à la peinture et revient au dessin. Elle fait le siège de la maison Canson pour obtenir d’elle la fabrication d’un papier déjà marouflé qu’elle utilise pour la production de ses oeuvres. Elle a recours à des substances qui stimulent sa créativité (hallucinogènes et autres “potions magiques”). Enfin, elle entreprend les démarches nécessaires pour changer de sexe, une opération aujourd’hui prise en charge en France à partir du moment où elle découle d’une décision mûrement réfléchie. Cette métamorphose qui n’a pas été sans susciter peurs et angoisses, Marie Laure la raconte dans un livre sur lequel elle va travailler pendant plus de six ans et qu’elle a aujourd’hui finalisé. Mais c’est la peinture qui reste pour elle la priorité. En attendant la réalisation d’un film d’animation de dix épisodes qui mettra en scène son œuvre picturale (un chantier de deux ans de travail !), elle a décidé de produire avec un ami cinéaste un petit un court-métrage de 8 à 10 minutes qu’ils envisagent de présenter au festival d’Annecy. Autant de projets qui rythment sa nouvelle vie alors qu’elle a amorcé un retour en force à la peinture à l’huile, une peinture devenue plus graphique après quelques années consacrées au dessin et qui puise son inspiration aussi bien dans un imaginaire fantasmagorique personnel que dans la géométrie fractale. Marie Laure Fadier est aujourd’hui une femme et une artiste épanouie qui n’a décidément pas fini d’entreprendre et de nous étonner !

(*) Marie Laure Fadier s’est éteinte le 2 juillet 2025. Nous présentons nos plus sincères condoléances à sa famille.

Une grande partie de l’œuvre de Marie Laure Fadier est visible sur internet sur le site www.marielaurefadier.com.

Conseil de Quartier Pernety : la chienlit jusqu’à quand ?

Cela fait aujourd’hui quatre ans que le plus grand désordre règne au sein du Conseil de Quartier Pernety sans qu’aucune issue positive et constructive ne soit en vue. Quelle est donc la malédiction qui touche cette instance participative d’expression, de co-construction, de proposition et d’initiative, conçue au service des habitants et des acteurs de notre bien-aimé Village Pernetix ?

Une ambiance toujours délétère

On avait pu espérer qu’un vent d’air frais allait souffler sur le Conseil de Quartier Pernety avec l’arrivée en septembre dernier de nouveaux volontaires au Comité d’Animation dont nous sentions tous qu’ils étaient capables et susceptibles de donner un nouvel élan à la très poussiéreuse et très ronronnante structure municipale (cliquez ici). Patatras ! En fait d’habits neufs, ce sont des habits de clown qu’a revêtus le Conseil de Quartier Pernety en cette fin d’année 2022 : nouvelles démissions, demandes d’exclusion en rafale, membres du Comité d’Animation ostracisés, listes de votants trafiquées, bagarres en réunion plénière, comptes-rendus de réunions rendus illisibles par leur interminable longueur, projets abandonnés, etc., la liste des dysfonctionnements qui minent le Conseil de Quartier n’en finit pas de nourrir les quolibets des Pernetiens qui daignent encore s’intéresser à la vie citoyenne. Il s’agit pourtant à la marge de l’utilisation de l’argent des contribuables ! Mais quel mauvais génie hante donc cette émanation de la Mairie du 14ème arrondissement, dont l’activité principale serait de glisser des peaux de banane sous les pieds de celles et de ceux qui veulent sincèrement faire avancer leur Quartier en portant de beaux projets comme celui de la pose d’une plaque mémorielle au 54 de la rue du Château (une adresse mythique de l’histoire de l’art en ce qu’elle a été le rendez-vous il y a tout juste un siècle de très nombreux artistes surréalistes dont notamment Prévert, Breton, Desnos et Tanguy) ? L’enquête du Service de Démocratie Locale piétine, les toutous aboient et la caravane passe. Tout va très bien, Madame la Marquise ! Les griefs de celles et ceux qui auraient souhaité ces dernières années mieux travailler avec le Conseil de Quartier comptent pour du beurre (cliquez ici) et les très récentes contestations concernant les “fraudes” qui auraient affecté la sincérité des votes réalisés lors de la dernière réunion plénière de décembre ne peuvent sans doute émaner que d’un cerveau malade…  “L’ambiance est délétère”, a commenté Mme la Maire Carine Petit alors qu’elle assistait à la réunion plénière d’octobre 2022 à l’occasion de laquelle certains participants en sont presque venus aux mains sous le regard médusé des policiers municipaux venus participer à la discussion organisée sur le thème de la sécurité. Y a-t-il encore un pilote dans l’avion ?

Qui sera le prochain cadavre exquis du Conseil de Quartier Pernety ?

Humilité et respect demandés

Piloter un Conseil de Quartier demande certes des qualités intellectuelles, mais également des qualités humaines et morales. Il ne faut bien sûr pas être naïf ou faire semblant d’ignorer que se jouent au sein de cette instance citoyenne (qui n’est pour beaucoup qu’un marchepied politique) des stratégies personnelles non-avouées. Mais l’agenda politique caché de tel ou tel doit-il être le prétexte de toutes les manoeuvres frauduleuses ou de déstabilisation du rival supposé ? Le jeu démocratique exige le respect des règles et de l’adversaire qui ne doit pas être traité avec brutalité, déloyauté, condescendance ou mépris, mais bien plutôt avec tact, compréhension et équité. Sans quoi ce jeu démocratique dégénère immanquablement en un très stérile obstructionnisme procédurier dans le tapis duquel les plus aguerris à la ruse et aux calculs politiques finissent par se prendre les pieds, comme vient de le démontrer le dernier scandale en date du Conseil de Quartier Pernety. On devrait pourtant pouvoir faire avancer son Quartier en portant de beaux projets pour le collectif sans systématiquement susciter la défiance des uns et des autres. A quoi cela sert-il de toujours vouloir jouer perso et/ou de s’enfermer dans l’opposition systématique ? Construisons plutôt – sans tacler au passage ceux qui sont plus capables ou plus brillants ou qui ont à l’occasion de meilleures idées que nous-mêmes ! Cela impose de surmonter son égo, d’accepter de ranger la jalousie au rayon des accessoires inutiles et de faire preuve d’humilité. On ne peut pas tout savoir sur tout, avoir toutes les qualités et toutes les compétences, et on a nécessairement besoin des autres pour faire avancer le Bien commun. Noël est une période propice aux belles paroles, espérons que celles-ci seront suivies d’effets lors des prochaines réunions du Conseil de Quartier Pernety. Nous sommes pour notre part définitivement persuadés que le Père Noël n’est pas une ordure !

Le ciel est tombé sur la tête du Père Noël !

Les 40 ans de vraie vie de Château de Daniel Chenot, photographe

Au café Le Cadran (photo Daniel Chenot)

Ancien pilier du Quartier Pernety, Daniel Chenot en a conservé par devers lui l’âme en plus de la mémoire. Il a habité à Pernety dès ses plus jeunes années et a eu pendant 40 ans son atelier de photographe-illustrateur-publicitaire au 130 de la rue du Château. Avec le soutien de Dominique Mazuet qui dirige La Librairie des Tropiques, il a publié en 2014 un beau livre de photographies intitulé rue du Château qui est un témoignage de la rénovation immobilière opérée dans notre Quartier au début des années 80 et qui finira par le contraindre à quitter son atelier. Il écrit dans la préface de son livre : “Dès mon arrivée dans ce petit coin retiré du XIVème, je fus touché par la chaleur humaine de mes nouveaux voisins : une petite communauté vivant dans la cour du 130 grâce à des loyers modérés. Je me souviendrai toujours de leur gentillesse et de leur intérêt à mon égard”. Faut-il croire aux forces de l’esprit pour prétendre que rien n’a changé ?

Les “règles du Quartier”

Cela fait aujourd’hui dix ans que Daniel Chenot a laissé son atelier derrière lui, le 130 de la rue du Château laissant la place à un énigmatique 130 bis. Mais la nostalgie des habitants du Quartier semble toujours habiter le photographe alors que nous nous escrimons à l’interroger sur son métier de créateur et d’artiste du 14ème: “La vraie création, ça reste quand même les gens qui font partie du Quartier”, nous recadre-t-il gentiment dès le début de notre interview. Elle naît des relations nouées entre les différentes personnalités de chacun”. D’ailleurs, le premier chapitre de rue du Château se passe au bistrot Le Cadran, l’ancien nom des Tontons qui fait l’angle de la rue du Château et de la rue Raymond Losserand. “La nostalgie est derrière le comptoir”, nous certifient dans un autre beau livre de photos Pierre Josse et Bernard Pouchèle (*). Et effectivement, les souvenirs du Cadran se bousculent dans la tête de Daniel : “Ce café était un point de rencontre très important du Quartier, se rappelle-t-il. Il servait aussi de distributeur de billets à une époque où il n’y avait pas encore de carte bleue, car c’est Nono, la gérante et propriétaire, qui bien souvent nous prêtait de l’argent pour le week-end. Nous avions également pour règles du Quartier de ne jamais payer notre café car nous étions toujours invités par une personne qui se trouvait au bar et c’était à chacun son tour sa tournée. Il y avait pas mal de gens qui venaient de très loin pour venir prendre leur café à cet endroit”. Daniel se souvient qu’à son époque tout le monde se saluait en se souhaitant le bonjour dans l’artère du Village Pernety où il avait son atelier. Avant la rénovation urbaine qui a en réalité été entamée dès les années soixante, la rue du Château abritait des imprimeurs, des photographes, bon nombre d’artistes désargentés, et même un théâtre comme en témoigne le livre de photos du vétéran du Quartier. Seules quelques petites maisons  – dont l’atelier d’Anna Waisman – ont survécu. “Adieu, charmantes courettes jouxtant ces petites maisons simples de deux étages au plus, et qui faisaient la magie de ce coin de Paris populaire !”, écrit Daniel en préface de rue du Château. Un coin de Paris populaire qui vaut bien toutes les vies de château…

Les habitués du Cadran et le flipper des années 80 (photo Daniel Chenot)

De la rue Vercingétorix à la rue du Château

Oui, rue du Château est un livre nostalgique, et alors ? Daniel Chenot est profondément humaniste et assume totalement son amour du Village Pernety et son attachement à tous les souvenirs qui continuent à le relier à lui. Il nous raconte comment, quelque temps après sa rencontre avec Robert Doisneau qui lui permet en 1964 de devenir reporter-photographe pour l’agence de communication Synergie, il est hébergé dans l’ancien atelier de Gauguin du 6 rue Vercingétorix par Pierre Jamet, un ami qui en plus d’être photographe est également chanteur puisqu’il est l’un des membres du groupe vocal Les Quatre Barbus très en vogue à l’époque. Appuyé par son père imprimeur qui le guide vers ses premiers clients, Daniel finira par installer son atelier de photographe-illustrateur-publicitaire au 130 rue du Chateau en 1974. C’est un grand atelier de plus de 80 m2 qui s’étale sur trois étages et qui comprend un labo au sous-sol, un espace photo au rez-de-chaussée et des bureaux au premier étage. Il va y rester quarante ans pour exercer son art tout en étant témoin de la démolition de nombreux bâtiments de son voisinage qu’il décidera d’immortaliser dans son ouvrage paru en 2014. Pendant que les pelleteuses s’activent, il ne perd pas une miette de l’humanité qui se manifeste autour de lui. Il se souvient comment, après avoir installé un piano dans son atelier à l’invitation de sa professeure de musique, il intriguait beaucoup le balayeur qui l’écoutait répéter toujours les mêmes morceaux à travers la vitre du rez-de-chaussée… Il se souvient également comment il a été aidé dans son activité de photographe par le fils de sa voisine grecque qui exerçait à l’époque le métier de coiffeur près de son atelier et qui s’est révélé être un renfort très précieux. Il se souvient enfin de ses multiples expositions au café Le Cadran dont la salle du restaurant accueillait des habitués venant tout aussi bien de Paris que de la campagne. Toute cette chaleureuse ambiance de la rue du Château et alentours est illustrée par de nombreuses photos du livre du photographe qui est toujours bien plus prompt à parler humain qu’à parler technique.

Les pelleteuses à l’assaut du 112 rue du Château (Anna Waisman à la fenêtre du 110) (photo Daniel Chenot)

Un métier relié au temps

Daniel se décide quand même à nous entretenir de son métier de professionnel de la photographie, mais sans jamais se départir d’une certaine hauteur de vue. “Mon métier est infiniment relié au temps car une bonne photo d’il y a dix ou vingt ans n’est pas toujours une bonne photo aujourd’hui, nous explique-t-il. Quand j’ai commencé mon travail, la conception de l’image n’était pas du tout la même et chaque époque a sa propre manière de voir. Les photographes, de même que les publicitaires qui sont souvent les commanditaires de leur travail, peuvent d’ailleurs très facilement reconnaître la période ou même l’année à laquelle une photographie se rapporte. Cela ne veut nullement dire que les photos anciennes sont mauvaises, cela veut seulement dire que notre appréhension de l’image est sujette au temps, autrement dit que ce que l’on ressent d’une image dépend de l’époque où elle a été prise. Cartier Bresson disait des photos qu’elles étaient des coupures dans l’univers du temps.” Les grands photographes de leur temps ont permis à cet art longtemps considéré comme un art populaire d’acquérir ses lettres de noblesse. Cela fait à peine trente ans que l’on expose des oeuvres photographiques, la première exposition de photos en couleur de Daniel datant de 1995. La révolution numérique des années 1990-2000 a encore rebattu les cartes et achevé de démocratiser l’accès de tous à la photographie au point que chacun peut aujourd’hui s’improviser photographe muni d’un simple téléphone portable. A-t-on d’ailleurs encore aujourd’hui besoin de cours pour réaliser des bonnes photos ? Sans prétendre pouvoir définir ce qu’est une bonne photo après nous avoir longuement expliqué que cette notion était très évolutive dans le temps et éminemment personnelle dans la mesure où elle fait intervenir les subjectivités du preneur d’images et de de ceux qui contemplent son travail, Daniel n’en continue pas moins à enseigner l’art de la photo le samedi à 10h30 à l’association ENAC (Enseignement Art et Culture) qui est basée au… 104 de la rue du Château ! “J’essaie très humblement d’apprendre à mes élèves à regarder en leur permettant d’affiner et d’enrichir leur regard et en tentant de leur faire prendre conscience de ce qu’ils regardent”, nous dit-il. La meilleure façon de vous convaincre de l’utilité de pouvoir bénéficier de l’oeil du photographe est sans doute d’acquérir son prochain ouvrage à paraître, fruit de ses promenades dominicales à Saint-Germain.

Une habitante de la rue du Château (photo Daniel Chenot)

(*) La nostalgie est derrière le comptoir, par Pierre Josse et Bernard Pouchèle, préface d’Alphonse Boudard, éditions Critérion.

Cliquez ici pour accéder au site de Daniel Chenot, Photographe.

Les toutous de Pernety se rebiffent !

Camille et Rita, fondatrices du groupe des “toutous du quartier”

“Tout, tout, tout, vous saurez tout sur les toutous !” Il fallait nécessairement un complément au dernier reportage de Télé 14 intitulé Les toutous du quartier font de la résistance (cliquez ici) qui, depuis cet après-midi, fait la une de l’actualité dans le 14ème arrondissement de Paris. Nous avons rencontré à la terrasse du bar-restaurant L’Imprévu Camille qui a fondé avec Rita, sa petite Chihuahua, le groupe des Toutous du quartier destiné à créer du lien social entre les habitant(e)s du village Pernety propriétaires de chiens. Il s’agit concrètement de permettre à tous et à toutes de se retrouver autour de nos amis à quatre pattes et de partager des conseils et des bons plans pour rendre leur vie plus agréable. Rien de scandaleux a priori ! C’était sans compter sur le zèle de la police municipale du 14ème…

Le mauvais plan des squares interdits aux chiens

Nous promettons de ne pas lui prendre plus d’un quart d’heure de son temps car Camille est très occupée. Elle s’apprête à reprendre la boutique Chez Victor qui est située à l’angle de la rue Pernety et de la rue de l’Ouest et qui réouvrira, si tout se passe bien, avant la fin du mois. Cette native du 14ème arrondissement est très attachée au Quartier Pernety dont elle se désole de constater la dégradation actuelle des conditions de vie des habitants. C’est précisément pour contribuer au mieux-vivre ensemble qu’elle a créé il y a tout juste deux ans, au moment du second confinement, le groupe des Toutous du Quartier : “Lorsque j’ai eu Rita ma petite chienne et que j’ai commencé à la promener, j’ai rencontré d’autres propriétaires de chiot avec lesquels j’ai souhaité rester en contact pour permettre son éveil et sa nécessaire sociabilisation, se rappelle Camille. Mais le groupe que j’ai créé a aussi permis aux propriétaires de chien de ne pas rester isolés pendant le confinement. C’est d’ailleurs assez incroyable de voir le nombre de personnes que j’ai pu rencontrer de cette manière – surtout des femmes sans enfant, ce qui témoigne d’une nouvelle façon d’envisager la vie en dehors de la famille nucléaire classique. Nous sommes aujourd’hui au total 47 membres du groupe qui échangeons des renseignements sur la santé de nos petits protégés ou sur comment trouver un bon vétérinaire dans le Quartier !” Camille découvre à cette occasion à quel point les chiens sont vecteurs de lien social. Les propriétaires de toutous prennent l’habitude de se réunir au square Alberto Giacometti qui fait l’angle de la rue Didot et de la rue des Thermopyles ou bien dans le petit jardin public de la ZAC Didot qui jouxte la Place de la Garenne. Dans ces deux endroits interdits aux chiens, ils jouent au chat et à la souris avec les employés municipaux : “Nous avons fini par bien les connaître, témoigne Camille. Souvent ils se contentent de nous dire que nous n’avons pas le droit d’être là sans nous verbaliser. Ils nous tolèrent et nous les respectons en retour”.

Quatre membres de l’équipe des “Toutous du quartier”

Rupture d’égalité

Patatras ! Cette fragile complicité n’a plus été de mise samedi matin dernier dans le square Alberto Giacometti quand une poignée de policiers municipaux est venue verbaliser les gentils membres des Toutous du Quartier. Camille n’était pas présente sur les lieux mais fait entièrement confiance à Olivia qui a raconté la scène : “Les policiers nous ont dit qu’ils étaient chargés d’éradiquer les toutous des squares sur ordre de la Mairie et de Madame la Maire du 14ème, ce qui n’a pas manqué de me faire sortir de mes gonds”. La chargée de communication de l’association Vivre Plaisance ose en effet rétorquer aux policiers qu’ils seraient sans doute mieux inspirés de pourchasser les dealers et ceux qui occupent le square en y laissant chaque jour leurs détritus. “Je pense que les propriétaires de chien respectent plus les parcs et jardins publics que beaucoup de gens, abonde Camille. Et malheureusement, c’est nous qui sommes hors-la-loi ! C’est vraiment triste parce qu’il y a même des gens qui viennent avec leurs enfants pour leur permettre de jouer avec nos toutous. On peut bien sûr comprendre que les jardins publics soient interdits aux chiens dans la mesure où beaucoup de leurs maitres ne respectent pas en France les règles de propreté et d’hygiène indispensables. Mais on peut sans aucun doute travailler sur ces comportements comme j’ai pu le conster à Barcelone où aucune déjection canine ne pollue les rues et les parcs dans lesquels les chiens sont naturellement admis.” Le respect des lois et des autres est sans doute la clef du problème qui dépasse largement les critiques que l’on peut adresser à telle ou telle municipalité. Pour autant, les Toutous du Quartier ne comptent aucunement désarmer et travaillent activement à la préparation d’un voeu qui sera soumis au Conseil d’Arrondissement de Paris 14ème et qui vise à autoriser l’accès aux squares des chiens restés sous le contrôle direct de leur maître. “Un bon chien vaut mieux que deux kilos de rats”, aimait à rappeler Boris Vian…
Un toutou qui se tient droit !

Chantal Grimm célèbre les belles rebelles du Moyen-Age et de la Renaissance

Chantal Grimm en concert (photo J. Amiel)

Les fées marraines qui se sont penchées sur le berceau de Chantal Grimm étaient-elles les belles rebelles du Moyen-Age et de la Renaissance dont elle réinterprète aujourd’hui les chansons et la poésie ? L’auteure-compositrice-interprète, très active dans le 14ème arrondissement de Paris au travers de ses activités associatives, a l’honnêteté de ne pas cacher qu’elle a été gâtée par la nature et dotée de multiples dons à l’origine d’une oeuvre foisonnante dont nous serions bien en peine de faire le tour. Rencontre au Château Ouvrier à l’issue d’un atelier d’écriture de nouvelles.

Artiste et historienne de la chanson

Chantal Grimm est une chanteuse à texte qui perpétue cette belle tradition française dont un des plus illustres représentants a également vécu dans le 14ème arrondissement de Paris. Toute féministe militante qu’elle soit, c’est bien le nom de Brassens qu’elle prononce en premier (avant celui de Brel et de Barbara) pour rattacher son oeuvre à celles de ses prédécesseurs. L’auteure-compositrice-interprète a elle-aussi pu bénéficier d’un éclairage médiatique à la fin des années 70 et au début des années 80 bien qu’elle ait, par timidité, longtemps hésité à frapper à la porte du métier qui correspond à sa vocation profonde. Elle se fait connaître comme artiste en organisant en 1976 le festival Chansons de femmes au théâtre Mouffetard à Paris et connait un beau succès à la radio avec son premier disque Variations en femmes majeures édité au Chant du Monde en 1978 et dont le titre Le Piano cassé est programmé par de nombreuses stations. Mais les chansons de la vague folk de la fin des années 70 dans laquelle elle s’inscrit ne pèseront pas lourd face à la déferlante hard rock dans les choix des programmateurs des radios les plus commerciales de l’époque. “Il faut bien reconnaître que ce métier est complètement asservi à des modes de plus en plus nombreuses et rapides qui nous viennent d’outre-atlantique et qui se mélangent plus ou moins bien à notre tradition”, constate Chantal. “A part quelques-uns qui, comme Anne Sylvestre, avaient suffisamment travaillé, les chanteurs à textes ont tous été balayés en 1982 peu après l’élection de François Mitterrand à la Présidence de la République, malgré les très méritoires efforts de Jack Lang pour soutenir les groupes qui pratiquaient l’activisme chanson dont le Printemps de Bourges et le Hall de La Chanson sont les héritiers”. Mais l’artiste a fort heureusement bien plus d’une corde à son arc. Elle s’est depuis bien longtemps intéressée à l’histoire et à l’esthétique de la chanson et a déjà sorti en 1972 avec deux amis un véritable dictionnaire de la chanson française intitulé Cent ans de chanson française. Forte de ce travail et de son succès artistique qui a duré environ cinq ans, elle a été invitée pendant des années à promouvoir la langue française dans le cadre de tournées à l’étranger organisées par l’Institut français et pendant lesquelles elle a alterné missions d’enseignement et activités artistiques. Et, si elle a depuis entamé une seconde carrière de chanteuse pour enfants, elle n’en continue pas moins à se produire ponctuellement lors de concerts et à sortir de nouveaux opus. Pour preuves : Mes lunes, un nouvel album de seize titres inédits sorti en février 2020, et également la quatrième réédition de Ballades des belles rebelles qui met en musique celles qu’elle considère comme ses vraies marraines en chant et en poésie tout droit sorties du Moyen-Age et de la Renaissance et répondant aux doux noms de Christine de Pisan, Marguerite de Navarre, Louise Labé, Pernette du Guillet, Marie Stuart, Madeleine de l’Aubespine, Madeleine des Roches, Marie de Brabant, Marie de Romieu ou encore Anne des Marquets.

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Fondatrice de l’association des Ecrivants Chanteurs

Presque vingt ans d’activités associatives dans le Quartier Pernety ont également fait de Chantal Grimm un personnage incontournable du 14ème arrondissement de Paris. Elle s’est définitivement installée dans notre Quartier en tant qu’animatrice en fondant en 2005 l’association des Ecrivants Chanteurs qui propose des stages de professionnalisation pour les chanteurs amateurs, des ateliers d’écriture et des cabarets-chansons. Chantal est ravie de mettre à profit un autre de ses dons qui lui est très cher et pour lequel elle a même été sollicitée par la Sorbonne : faire écrire les autres. S’agissant tout particulièrement de la chanson, elle se flatte d’avoir inventé une méthode qui fournit certaines clés pour mettre ses propres mots en musique : “Il y a beaucoup de gens qui ont le pouvoir d’écrire poétiquement et qui ont également une sensibilité musicale à l’audition, mais qui n’ont pas le pouvoir de créer des musiques”, fait-elle très justement observer. Chantal organise tous les mois au Château Ouvrier un atelier chanson qui est, depuis la pandémie, beaucoup plus vivant en distanciel qu’en présentiel. “On a réussi à faire chanter les gens par le moyen de téléphones portables qui sont aujourd’hui d’une telle qualité qu’on pouvait réellement croire qu’il s’agissait d’enregistrements studio quand on en a fait des disques. C’est sans doute le seul atelier qui existe aujourd’hui de cette manière, précise l’auteure-compositrice-interprète en me tendant deux CD édités par l’association qui témoignent du travail de très grande qualité des participants. “Forts de notre abondante production, nous avons également monté des spectacles à L’Atelier du Verbe du 17 rue Gassendi, ajoute-elle. Et nous avons eu la surprise de constater que des gens complètement inconnus qui font de la chanson à texte pouvaient remplir une salle. Nous envisageons même d’utiliser un nouvel endroit pour nous produire rue du Couédic dans l’atelier de sculpture d’une de nos stagiaires qu’elle va transformer en salle de spectacle pour notre usage.” A côté de l’atelier chanson, l’artiste-enseignante anime également au Château Ouvrier des ateliers hebdomadaires d’écriture de nouvelles d’un niveau plutôt exigeant et qui ont également été l’occasion de la parution de deux livres écrits par ses élèves intitulés Contes et Nouvelles au Château Ouvrier (parus en 2017 et 2021 aux éditions Unicité). Pas étonnant qu’avec un tel bilan, l’association des Ecrivants Chanteurs déborde du cadre du seul 14ème arrondissement où elle a son siège : “Les deux tiers des participants à mes ateliers viennent d’ailleurs, nous précise Chantal. Certains du Midi de la France, d’autres de Bourgogne ou même de Belgique.” Puissent les Ecrivants Chanteurs rayonner aussi loin et longtemps que les belles rebelles du Moyen-Age et de la Renaissance !

Cliquez ici pour accéder au site de Chantal Grimm et découvrir le panorama de ses multiples talents et activités. Cliquez ici pour accéder au site des Ecrivants Chanteurs.

Les Ecrivants Chanteurs en concert dans le 14ème au Jazz Café Montparnasse

Christian Deutsch, “médaille Fields citoyenne” du 14ème

La souriante équipe de CC14 au Forum des Associations 2022 (Christian Deutsch au fond à gauche)

Nous nous étions donné rendez-vous il y a presque un mois le 22 septembre 2022 à 11 heures au Café d’Orléans sur l’avenue du Général Leclerc et, à peine assis, j’ai commandé un Ricard. J’aurais été mieux inspiré d’opter pour un double café bien serré car Christian Deutsch est un redoutable intello. Il a été enseignant chercheur en mathématiques à la faculté, créateur d’une boite de conseil, haut cadre dirigeant d’une société multinationale en intelligence artificielle et fut en 2020 compagnon de route de Cédric Villani dans le cadre de sa campagne des élections municipales parisiennes. Il est aujourd’hui dans notre arrondissement le président fondateur de Citoyennes Citoyens de Paris 14ème (CC14) dont il nous a expliqué en 68 minutes et quelques flyers les tenants et les aboutissants.

Incub-acteurs de la démocratie particip’active

Citoyennes, Citoyens de Paris de 14ème est un incubateur d’initiatives citoyennes non partisanes. A l’origine de cette initiative, il y a le constat de l’actuelle défiance envers les corps intermédiaires (partis politiques, syndicats, entreprises, etc.) qui éloigne les citoyens du politique au sens noble du terme et met notre démocratie représentative en danger. D’où l’urgente nécessité de remettre les citoyens au coeur de la cité pour que les décisions prises au nom de l’intérêt général soient comprises, acceptées et suivies. CC14 se propose d’aider les habitants et usagers du 14ème à co-construire leur arrondissement en favorisant la participation citoyenne et en accompagnant le développement de leurs projets. L’association mobilise à ce titre ses adhérents et sympathisants, qui peuvent être “correspondants territoriaux” ou “incub’acteurs”, pour accompagner et aider les Conseils de Quartier dans les initiatives citoyennes qu’ils soutiennent. Rien de moins fumeux que tout cela : la preuve par les mégots ! Le 17 septembre 2022, CC14 s’est mobilisée pour participer à la Journée Mondiale du Nettoyage (World Cleanup Day) dans le cadre de la co-construction d’un projet “zéro mégot” avec la Mairie du 14ème qui trouve son origine dans l’initiative individuelle de Rayan, un citoyen engagé et amoureux de Paris qui s’est un jour mis à ramasser les mégots qui jonchent les trottoirs parisiens. Depuis, tous les samedis de 11 heures à 13 heures, les membres de CC14 au premier rang desquels se trouvent Marie-Pierre Bigot, Sébastien Goy et Rayan, mènent des actions pour la propreté de nos rues : 3.000 mégots sont ramassés en deux heures, ce qui aboutit à économiser 300.000 litres d’eau non polluée sachant qu’un seul mégot pollue cent litres d’eau, met douze ans à se désagréger et génère des microplastiques qui polluent pendant 150 ans (!). Par cet exemple très concret, Christian nous montre comment une problématique qui peut se poser à n’importe quel individu peut se transformer en projet citoyen. “Nous souhaitons avec CC14 redonner le goût à la politique dans un rapport non clientéliste d’interaction citoyenne, nous explique Christian qui est très alarmé par le taux d’abstention aux élections. Pour ce faire, nous nous sommes demandés ce qui pouvait ramener le citoyen dans l’élection et le jeu politique local en le rendant acteur de la vie démocratique de la cité. Car, poursuit-il, une fois sorti de la campagne électorale, le citoyen disparait pour ne plus apparaître que lorsque les élus le décident dans le cadre de participations publiques concernant par exemples le Plan Local d’Urbanisme (PLU) ou bien l’aménagement de certaines places (Denfert-Rochereau, de Catalogne, des Droits de l’Enfant, etc.). Or ces consultations sont souvent des faux-semblants en ce qu’elles sont loin de respecter les principes de la démocratie particip’active énoncés dans la Charte mise en place par le gouvernement en matière d’environnement et qui a été utilisée de façon exemplaire par le Conseil régional Centre-Val de Loire pour toutes les questions de participation publique. Cette charte n’est malheureusement absolument pas appliquée par la Mairie de Paris.”

Accompagner les Conseils de Quartier

Christian et les membres de CC14 sont convaincus que tous les citoyens ont un rôle actif à jouer dans la vie de la cité, y compris en dehors des campagnes électorales. Cette implication accompagnant la conscience citoyenne doit naturellement aboutir à faire monter l’exigence collective envers les élus. En quoi cependant l’action de CC14 se distingue-t-elle de celle des Conseils de Quartier qui sont des structures qui existent depuis 2002 et qui associent les habitants des grandes villes à la gestion municipale ? “CC14 accompagne les Comités d’Animation des Conseils de Quartier et veille à ce qu’ils fonctionnent mieux, nous répond Christian. Nos adhérents et sympathisants sont d’ailleurs bien présents dans chacun des Conseils de Quartier du 14ème arrondissement et contribuent à en améliorer le fonctionnement en les décloisonnant géographiquement et en oeuvrant à la coordination et à la mutualisation des ressources nécessaires pour en assurer l’animation. Nous avons un rôle assez semblable à celui de l’observatoire de la démocratie locale dont nous venons de faire voter, lors de notre dernière plénière, l’urgence de la mise en place.” Car Christian est tout particulièrement actif au sein du Conseil de Quartier Mouton-Duvernet sur le territoire duquel se trouve le site de La Rochefoucauld. Ce site qui constitue un enjeu municipal considérable a été l’occasion d’une véritable démonstration de force du travail de CC14 à toutes les étapes de l’élaboration du PLU. “Lors de la première phase du PLU, la Mairie a lancé une consultation demandant aux citoyens de s’exprimer sur le diagnostic, se rappelle Christian. A l’occasion de cette phase essentielle, CC14 a déposé 80 à 90% (!) des points de diagnostic, ce qui a d’ailleurs été le motif d’un grand satisfecit de la Mairie sur l’efficacité de la consultation. Nous avons par la suite participé, conjointement avec l’association Sauvons La Rochefoucauld, à la rédaction d’un voeu voté en plénière puis en Conseil d’Arrondissement par lequel nous réclamions aux élus une véritable concertation sur le projet de même que la mise en place d’un comité de suivi – qui n’est pourtant malheureusement toujours pas installé aujourd’hui…”. La relative efficacité du travail entrepris ne décourage nullement Christian. CC14 continuera à communiquer pour alerter les habitants et usagers du 14ème et les exhorter à tenir leur rôle de citoyens concernés par l’évolution de leur cadre de vie local. L’une des dernières initiatives de l’association a d’ailleurs été d’accompagner et de soutenir le Comité d’Animation du Conseil de Quartier Mouton-Duvernet dans la réalisation lors du dernier Forum des Associations d’un sondage intitulé “Vivre la citoyenneté sur votre quartier” et destiné à mesurer la motivation des Quatorziens à participer à leur Conseil de Quartier. Un paramètre ô combien important à prendre en compte lorsqu’on s’attelle à résoudre l’équation pas du tout impossible du mieux vivre ensemble dans le 14ème arrondissement de Paris !

Cliquez ici pour accéder au site de CC14.

Des jeunes également très motivés